ABOU BAKR "AS-SIDDIQ" (LE VERIDIQUE)
Le Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) a dit : "Certes, Aboû Bakr, tu seras le premier individu de ma communauté à entrer au Paradis !" (Rapporté par ABOU DAWOUD et AL HAKIM)
Le Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) a dit : "S'il m'avait été permis d'avoir pour ami intime quelqu'un d'autre que Allah, cela aurait été Aboû Bakr. Seulement, il est mon frère et mon compagnon. " (Rapporté par BOUKHARI)
Allah Le Très Haut a dit : "C'est Allah Qui l'a déjà secouru quand, expulsé par les infidèles, et se trouvant au fond de la grotte, seul à seul avec son compagnon, il se mit à lui dire, l'encourageant : "Ne t'afflige pas ! Allah est avec nous". Allah fit descendre sur lui Sa sérénité réconfortante et l'assista de troupes invisibles..." (S9/V40).
D'après Ibn 'Omar (Que Allah soit satisfait de lui), le Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) a dit à Aboû bakr : "Tu étais mon compagnon dans la caverne, et tu seras mon compagnon près du bassin (au Jour de la Résurrection)." (Rapporté par TIRMIDHI)
Le Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) a dit : "Certes, Aboû Bakr, tu seras le premier individu de ma communauté à entrer au Paradis !" (Rapporté par ABOU DAWOUD et AL HAKIM)
Le Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) a dit : "S'il m'avait été permis d'avoir pour ami intime quelqu'un d'autre que Allah, cela aurait été Aboû Bakr. Seulement, il est mon frère et mon compagnon." (Rapporté par BOUKHARI)
'Omar Ibn Al Khattâb (Que Allah soit satisfait de lui) a dit :
"Y en a t-il un meilleur que celui qui fut "l'un des deux", avec Allah pour troisième ! ?"
SA NAISSANCE ET SES ORIGINES
Son nom est Aboû Bakr 'Abd-Allâh Ibn Abî Qouhâfa 'Othmân Ibn 'Amir Ibn 'Amr Ibn Ka'b Ibn Sa'd Ibn Taïm Ibn Mourra Ibn Ka'b Ibn Louaï Ibn Ghâlib Al Qourachi At-Taïmi. Son lignage rejoint celui du Prophète de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui), dans un ancêtre commun : Mourra Ibn Ka'b.
Il est connu sous le surnom â'as-Siddîq (le véridique), mais on l'appelait aussi 'Atîq (affranchi) ou 'Abd-Allâh. On raconte qu'il était connu sous ces noms depuis l'époque préislamique, et que l'avènement de l'Islam n'avait fait que les confirmer.
- Mouss'ab Ibn Az-Zoubaïr, ainsi que Al-Laïth Ibn Sa'd et d'autres ont rapporté que toute la communauté a été unanime à dire que l'appellation d'as-Siddîq lui avait été donnée parce qu'il avait été le premier à croire au message du Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui), sans jamais avoir douté de lui et sans que sa foi ait jamais fléchi, depuis son adhésion. Il a pris des positions remarquables, et n'a jamais remis en cause les dires du Messager de Allah ; ce fut surtout évident à l'occasion de l'événement d'al issrâ' wa-l-mi'râj (le voyage nocturne et l'ascension).
- On a dit qu'on l'avait appelé 'Atîq à cause de la beauté de son visage (car le mot 'Atîq admet cette acceptation). Certains ont dit que c'était à cause de son lignage pur. D'autres ont rapporté qu'il n'avait été surnommé 'Atîq (dans le sens de "affranchi") qu'après l'avènement de l'Islam et après l'événement de l'ascension du Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui), lorsqu'il avait apporté courageusement son soutien au Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui), alors que nombreux étaient les musulmans qui doutaient ! Le Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) lui aurait alors annoncé que Allah l'avait affranchi de l'Enfer. (Rapporté par TIRMIDHI)
Avant l'Islam, on l'appelait aussi 'Abd al Ka'ba, que le Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) changea en 'Abd-Allâh.
* * *
Aboû Bakr appartenait à la tribu de Qouraïch ; ses parents étaient tous deux des Banoû Taïm. C'étaient des gens dont les hommes étaient réputés par la douceur de caractère et la bonne éducation. On rapporte aussi que leurs femmes étaient connues pour leur coquetterie, qu'elles étaient, parmi les femmes arabes, les plus appréciées, et qu'elles avaient beaucoup de faveur auprès de leur époux. Peut-être était-ce dû au fait que les Banoû Taïm s'étaient sédentarisés depuis longtemps, et que le commerce, auquel ils s'adonnaient, nécessitait de la bonne éducation et un certain savoir-vivre, ignoré par les bédouins dont la vie exigeait au contraire de la rudesse et un caractère dur.
Cette bonne éducation était d'ailleurs manifeste dans la famille d'Aboû Bakr. Les sources de l'Histoire nous informent que rares étaient les familles qui jouissaient d'une solidarité, d'une affection et d'une intimité comparables à celles qui unissaient Aboû Bakr à ses parents d'un côté, et à ses enfants d'un autre côté.
Son père s'appelait 'Othmân mais il était connu sous le nom d'Aboû Qouhâfa. Sa mère s'appelait Salma et était connue sous le nom d'"0umm Al Khaïr" (la mère du bien).
Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) est né deux ou trois ans après l'événement de l'Eléphant, donc plus ou moins en l'an 572-573 apr. J.-C., si nous considérons que le Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) était né l'année de l'Eléphant, qui a été fixée aux alentours des années 569-571 apr. J.-C. selon les dires des historiens. Aboû Bakr était de deux ans et quelques mois plus jeune que le Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui). Il est né à la Mecque, qu'il ne quittait que pour s'adonner au commerce. Dès son jeune âge, il avait la réputation d'être un homme intègre, bon, honnête et loyal. Il jouissait d'un grand respect auprès des siens. La tribu de Qouraïch l'avait désigné pour la représenter dans les litiges qui l'opposaient aux autres tribus dans les discussions pour le prix du sang {ad-diyyat}, lors d'incidents menant à la mort d'hommes. Il faisait partie de ceux que l'on consultait pour les affaires graves touchant à la sécurité de la tribu. Il était une personne très attachante, respecté de tous pour sa générosité, ses bienfaits et le soutien qu'il apportait aux nécessiteux de tout genre. Sa bonté lui valut de gagner l'estime des gens et d'être l'ami intime du jeune Mohammad Al Aminé. Lorsque Allah annonça à Son Envoyé qu'il l'avait élu pour transmettre Son ultime message aux Hommes, Aboû Bakr fut le premier à y adhérer ; il délaissa sa richesse et les honneurs dont il jouissait auprès de Qouraïch pour un bien plus durable et éternel : la Satisfaction de Allah !
Il fut le premier des Compagnons du Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) et son ami très proche.
Il était d'une vertu exemplaire. Sa fille 'Aïcha (Que Allah soit satisfait d'elle) a dit de lui : "Par Allah, Aboû Bakr n'a jamais dit de poésie, avant l'Islam ; et depuis l'époque même de la jâhiliyya1, il évitait, ainsi que 'Othmân, de consommer de l'alcool ! (Rapporté par IBN 'ASSAKIR). On a rapporté qu'on a demandé à Aboû Bakr pourquoi il n'avait jamais bu d'alcool, et qu'il a répondu : "Parce que je voulais préserver mon honneur, et sauvegarder ma réputation ; car celui qui consomme de l'alcool ne fait attention ni à son honneur, ni à sa dignité !" Lorsque le Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) a été informé de ce qu'avait dit Aboû Bakr, il dit : "Aboû Bakr a dit vrai ! Aboû Bakr a dit vrai !" (Rapporté par IBN 'ASSAKIR)
1 al jâhiliyya : l'époque préislamique.
LES TRAITS PHYSIQUES D'ABOU BAKR (QUE Allah SOIT SATISFAIT DE LUI) Ibn Sa'd a rapporté qu'Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) avait un teint clair, qu'il était maigre, n'avait pas de larges épaules, que ses cheveux étaient abondants, qu'il avait le front dégagé, des yeux enfoncés dans leur orbite, et qu'il avait le dos légèrement courbé. Ses pieds étaient fins, il était d'une taille plutôt moyenne et avait une apparence agréable.
SES EPOUSES ET ENFANTS.
Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) a épousé, avant l'Islam, Qatila la fille de Sa'd, qui lui a donné 'Abd-Allâh ainsi qu'Assmâ', qui fut l'une des femmes les plus courageuses de l'Islam.
Aboû Bakr épousa aussi, avant sa conversion, Oumm Roûmân, qui lui donna 'Abd-Arrahmâne et aussi 'Aïcha, qui devint l'épouse du Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui).
Après sa conversion à l'Islam, il épousa Habîba fille de Khârija Ibn Zaïd Ibn Abî Zouhaïr Al Khazraji. Elle lui donna une fille que 'Aïcha (Que Allah soit satisfait d'elle), nomma Oumm Kalthoûm.
Puis Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) épousa Assmâ' la fille de 'Oumaïss, qui lui donna Mohammad.
SA CONVERSION A L'ISLAM
Aboû Sa'îd Al Khoudri (Que Allah soit satisfait de lui) a raconté qu'Aboû Bakr a dit : "Ne suis-je pas celui qui a le plus de mérite pour succéder au Prophète ? Ne suis-je pas le premier homme à m'être converti à l'Islam ? Ne suis-je pas celui qui a telle qualité, et telle qualité... ?" (Rapporté par TIRMIDHI et IBN HIBBAN)
Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) était très proche du Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) : il était son ami ; et Aboû Bakr savait que son ami était le plus illustre d'entre tous les Arabes, et que son honnêteté était exemplaire. Aussi, dès que le Prophète Mohammad (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) annonça sa mission, il fut le premier homme à y répondre et à y adhérer.
Zaïd Ibn Arqam (Que Allah soit satisfait de lui) a rapporté que le premier homme à avoir prié derrière le Prophète fut Aboû Bakr." (rapporté par IBN ABI KHAïTHAMA)
'Alî Ibn Abî Tâlib (Que Allah soit satisfait de lui) a rapporté qu'Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) a éte le premier homme musulman." (Rapporté par IBN 'ASSAKIR)
Tous les musulmans sont unanimes à ce sujet. Quant aux modalités, certaines versions disent que le Prophète de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) s'est adressé particulièrement à lui ; mais d'autres ont rapporté que lorsque le Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) s'est adressé publiquement aux gens dans l'enceinte de la Ka'ba, Aboû Bakr a eu écho de cet appel, et qu'il est alors venu trouver le Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) en lui demandant : "0 Aboû al-Qâssim, que vient-on de me dire ?" Alors le Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) lui aurait demandé ce qu'on lui avait raconté à son sujet. Aboû Bakr lui aurait répondu: "On m'a dit que tu appelais à l'unicité de Allah, et que tu prétendais être un messager !" Le Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) lui aurait alors dit : "Oui, Aboû Bakr ! Le Seigneur a fait de moi celui qui annonce aux gens la bonne nouvelle (bachîr), et a fait de moi l'avertisseur {nadhîr), et II m'a mis sur la voie d'Abraham ; mon message s'adresse à tous les Hommes !" Alors Aboû Bakr dit au Prophète: "Par Allah ! Je ne t'ai jamais vu mentir, et, certes, tu as été créé pour cette mission prophétique, car tu es d'une grande honnêteté, et tu es connu pour maintenir les liens de parenté et pour tes nobles qualités ! Tends la main pour que je prête le serment d'allégeance !"
Le Prophète de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) a dit : "Quand j'ai invité les gens à embrasser l'Islam, tous ont pris un temps de réflexion et d'hésitation, excepté Aboû Bakr : il ne s'est pas retenu, et n'a pas hésité !" (Rapporté par IBN ISHAQ dans sa Sîra)
Aboû Darda' (que Allah soit satisfait de lui) a rapporté que le Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) a dit : "N'allez-vous pas laissez tranquille mon compagnon ! N'allez-vous pas cesser, et laisser tranquille mon compagnon ! Lorsque je vous ai dit : "0 peuple, je suis le Messager de Allah auprès de vous ! Vous m'avez répondu :
"Menteur !", sauf Aboû Bakr qui, lui, m'a cru !" (Rapporté par BOUKHARI)
AU SERVICE DE L'ISLAM
1. L'accompagnement du Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui)
Les savants de l'Islam ont rapporté qu'Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) a accompagné le Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) tout au long de sa mission, et a été omniprésent à ses côtés depuis le jour de son adhésion, jusqu'à la mort du Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui). Il ne l'a pas quitté ni pour un déplacement, ni pour un séjour au loin, excepté lorsque le Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) lui a confié certaines missions, comme par exemple lorsqu'il l'a désigné à la tête des pèlerins musulmans en l'an 9 de l'hégire.
Aboû Bakr a participé aux côtés du Messager de Allah à toutes les batailles qui ont opposé les musulmans aux mécréants. Il a été honoré par le Messager de Allah qui l'a choisi comme unique compagnon lors de son émigradon de la Mecque vers Médine. Allah a rendu éternel cet accompagnement dans Sa Parole révélée: "Et se trouvant au fond de la grotte, seul à seul avec son compagnon..." (S9/V40).
Il a délaissé les siens pour la cause de Allah, et a dépensé toute sa fortune au service de l'Islam. Il fut un des rares Compagnons à rester ferme dans les situations les plus critiques, et n'a pas douté un instant de l'appui octroyé par Allah à Son Messager, lors de la bataille d'Ouhoud et de la bataille de Hounaïn, alors que tout le monde avait pris la fuite ! 'Alî (Que Allah soit satisfait de lui) a rapporté que le Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) lui avait dit à lui et à Aboû Bakr, le jour de la bataille de Badr : "Avec l'un d'entre vous, il y a l'ange Gabriel, et avec l'autre, il y a l'ange Michael !" (Rapporté par AHMAD et AL HAKIM)
2. Son courage et ses sacrifices
Les deux hadîth suivants montrent le courage dont faisait preuve Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) :
'Orwa Ibn az-Zoubaïr a raconté qu'il avait demandé à 'Abd-Allâh Ibn 'Amr Ibn Al 'Ass de lui parler de ce que les mécréants avaient fait subir de plus dur au Messager de Allah. Il répondit : "J'ai vu 'Oqba Ibn Mou'aït, alors que le Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) était absorbé dans sa prière dans un coin de la Ka'ba, prendre son vêtement, le passer autour du cou du Prophète et l'étrangler gravement avec ; alors Aboû Bakr est arrivé et l'a repoussé en disant : "Vous voulez tuer un homme qui dit : "Mon Seigneur, c'est Allah, et qui vous apporte les preuves de votre Allah ! ?" (Rapporté par BOUKHARI)
'Aïcha (Que Allah soit satisfait d'elle) a raconté : "Lorsque les Compagnons du Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) eurent atteint le nombre de trente-huit hommes, Aboû Bakr insista auprès du Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) pour qu'il proclame en public son message. Le Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) lui fit remarquer que les musulmans étaient encore très peu nombreux ; mais il n'a pas cessé d'insister auprès du Prophète jusqu'à ce qu'il acceptât ; alors les musulmans se réfugièrent dans la mosquée auprès de membres de leur clan, et Aboû Bakr se leva et prononça un discours dans lequel il appela les Qouraïchites à adorer Allah, et à suivre Son Messager. Aussitôt, les mécréants se jetèrent sur Aboû Bakr et le frappèrent durement, presque jusqu'à le défigurer ! (Rapporté par IBN 'ASSAKIR). Aboû Bakr fut le premier homme à prêcher pour l'Islam.
Le message de l'Islam rendit les Mecquois pleins de haine contre le Prophète et les nouveaux convertis. Mohammad (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) se moquait ouvertement de leurs idoles, et leur montrait l'erreur dans laquelle ils se cantonnaient en adorant des pierres inertes qu'ils sculptaient de leurs propres mains ! La réaction des mécréants de là Mecque, et plus spécialement celle d'un de leurs chefs, Aboû Jahl, fut violente, et les persécutions furent cruelles envers les musulmans, surtout envers les esclaves convertis, et ceux qui n'avaient pas d'origine noble, ou qui ne jouissaient pas du soutien d'une tribu puissante ou d'un clan réputé. Ces gens furent les premières victimes des exactions commises par les mécréants. Ils ne pouvaient fuir les tortures, mais refusaient aussi de renier leur foi : on les affamait en les privant de nourriture et d'eau, on les fouettait, on les brûlait au fer, on les faisait coucher sur le sable brûlant, on déposait sur leurs poitrines de lourdes pierres! En dépit de ces tortures, Bilâl (Que Allah soit satisfait de lui) ne cessait de les défier en proclamant tout haut son attachement et sa confiance absolue en Allah, il disait : "Ahad ! Ahad!" (Allah est Un ! Allah est Un !)
Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) va mettre la fortune que Allah lui avait donnée au service de ses frères dans la foi : il va racheter plusieurs esclaves musulmans et les libérer du joug de l'esclavage et de la torture. Allah (Qu'il soit loué) a dit à son sujet : "(Un feu flamboyant) dont sera préservé le très pieux, qui donne de son bien pour se purifier. Non pas en le faisant en échange de quelque bienfait reçu. Mais uniquement par désir de plaire à son Maître Le Très Haut ; celui-là, en vérité, ne sera pas déçu mais sera comblé !" (S92/V 17-21).
Aboû Houraïra (Que Allah soit satisfait de lui) a rapporté que le Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) a dit : "II n'y a pas de biens qui m'ont été utiles (pour défendre la cause de Allah) comme l'argent d'Aboû Bakr!" alors Aboû Bakr pleura et dit : "0 Messager de Allah, moi et mon argent sommes pour toi !" (Rapporté par AHMAD)
On a rapporté que lorsqu'il se convertit à l'Islam, Aboû Bakr possédait une fortune évaluée à quarante mille dinars, et qu'il a tout dépensé pour la cause de Allah ! (IBN 'ASSAKIR d'après 'Aïcha)
Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) a réussi à libérer sept musulmans, qui étaient tous torturés pour avoir adhérer à l'Islam : 'Amir Ibn Fouhaïra, Oumm 'Oubaïss, Zanîra, Nahdîya et sa fille, une esclave de Banoû Mou'ammil et Bilâl (Que Allah soit satisfait d'eux tous, et les accueille dans Ses Béatitudes).
Selon les historiens, les Mecquois n'ont pas hésité à utiliser tous les procédés afin d'asphyxier le nouveau message et de décourager les nouvelles adhésions, et à faire apostasier ceux qui étaient déjà musulmans. Ainsi, Al 'Ass Ibn Wâ'il refusa de payer ses dettes à Khabbâb Ibn Al Aratt qui était devenu musulman. Ibn Hichâm a rapporté dans sa Sîra : "Quant à Aboû Jahl, s'il entendait dire qu'untel avait rejoint la nouvelle religion de Mohammad, s'il s'agissait d'un noble et d'un puissant, il lui faisait des reproches et des insultes, en le traitant de renégat, et s'il était commerçant, il lui disait : "Par Allah, nous ferons en sorte que plus personne n'achète tes marchandises, jusqu'à ce qu'elles pourrissent. Si le converti était un faible, sans défense, il le frappait et poussait les autres à agir de la même manière !
3. L'émigration en Abyssinie
Le simple fait de vivre à la Mecque était devenu périlleux pour les nouveaux adhérents à l'Islam. Dans chaque clan, chaque tribu, il y avait de nouveaux musulmans. Cette situation déclencha une folie meurtrière et un terrible acharnement de la part de Qouraïch et de ses alliés à l'encontre du Prophète et des ses Compagnons : les ennemis des musulmans étaient même des membres de leur propre famille. Alors le Prophète de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) conseilla à ses fidèles de partir en Abyssinie, en leur disant : "Partez en Abyssinie, où il y a un roi auprès duquel personne n'est lésé, et nul ne saurait l'opprimer ; c'est un pays de vérité ! Restez-y jusqu'à ce que Allah rende les choses plus aisées." (IBN HI-CHAM, Sîra, tome 1, p. 280)
Les ennuis d'Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) n'étaient pas moindres que ceux des autres musulmans, bien qu'il fût membre du Conseil des Sages de la cité de la Mecque, et que la réputation de ses œuvres philanthropiques dépassait la Mecque elle-même. A son tour, il fut contraint de quitter son pays, et demanda la permission du Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) de pouvoir partir lui aussi en Abyssinie. Il prit le chemin du Yémen, pour s'y embarquer dans un port. Lorsqu'il arriva dans la région de Qârah, le chef de l'endroit, Ibn Ad-Doughounna, fut étonné et choqué de savoir qu'un homme aussi illustre qu'Aboû Bakr se trouvait, lui aussi, obligé de quitter sa patrie ! Très touché, il offrit à Aboû Bakr sa protection, et le ramena à la Mecque où il déclara publiquement qu'il serait désormais le protecteur d'Aboû Bakr. Il faut savoir qu'Ibn Ad-Doughounna était un allié militaire de Qouraïch ; c'est pour cette raison que les Qouraïchi-tes acceptèrent cette intervention. Après quelque temps, les Mecquois firent demander à Ibn Ad-Doughounna de dire à son protégé de ne plus réciter le Coran en public, car cela attirait les femmes et les jeunes gens ainsi que les esclaves de son voisinage. Ibn Ad-Doughounna demanda à Aboû Bakr de ne pas rendre sa position plus difficile et de cesser son prêche ; mais Aboû Bakr répondit courageusement à son protecteur : "Je n'ai plus besoin de ta protection ! Allah me suffit !", il décida néanmoins de rester à la Mecque, et de renoncer à l'émigration en Abyssi-nie, car de graves événements se préparaient, et des complots se tramaient qui menaçaient la vie même du Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) ! (IBN HICHAM, Sîra)
Les persécutions que rencontraient les musulmans étaient si violentes que le Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) conseilla à ses Compagnons d'émigrer en Abyssinie pour échapper à la répression de Qouraïch. C'est ainsi qu'ils partirent au mois de Rajab de la dixième année de la mission du Prophète (615 apr. J. C.). Ils étaient douze hommes et quatre femmes. Certains avaient des montures, et d'autres marchaient à pied. Allah les protégea jusqu'à ce qu'ils rejoignissent la côte, où ils s'embarquèrent sur deux navires. C'est lorsque les musulmans apprirent la nouvelle de la conversion de 'Omar Ibn Al Khattâb (Que Allah soit satisfait de lui), et que le message sortait de la clandestinité, qu'ils retournèrent à la Mecque. Mais les Qouraïchites avaient entre-temps envoyé un émissaire auprès du Négus (le Roi d'Abyssinie) pour lui demander de rapatrier de force les réfugiés musulmans, et cet émissaire avait essuyé un refus ; alors, à la Mecque, les persécutions se firent plus sauvages encore à l'encontre des musulmans. Cette situation très difficile, poussa le Prophète de Allah à conseiller à ses Compagnons de repartir de nouveau pour se réfugier auprès de ce roi juste. Ils étaient, cette fois, quatre-vingts-trois hommes, ainsi que onze femmes Qouraïchites et sept femmes d'autres tribus. Ils s'établirent en paix dans ce pays. Quand le Messager de Allah émigra à Médine, trente-trois hommes et huit femmes le rejoignirent ; deux hommes moururent à la Mecque après leur retour, et sept autres personnes furent retenues par les Qouraïchites.
Lorsque les gens de la tribu de Qouraïch constatèrent la manière avec laquelle le Négus (roi d'Abyssinie) avait accueilli les musulmans et les avait honorés, leur haine à l'encontre du Prophète de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) et des musulmans restés à la Mecque s'accentua. De plus, la conversion de 'Omar Ibn Al Khattâb et de Hamza agaça les Mecquois, qui prirent la ferme résolution de boycotter le clan des Banoû Hâchim, d'isoler les musulmans dans une vallée aride, et de leur faire subir un blocus socio-économique pour les affamer. Ceci dura trois années, trois années de souffrance qui s'achevèrent avec la mort des deux soutiens du Messager de Allah : son oncle Aboû Tâlib et l'épouse du Prophète (la mère des croyants) Khadîja (que Allah soit satisfait d'elle). C'était en l'an dix de la mission prophétique (620 apr. J. C.).
Après cette épreuve. Allah amena par Sa volonté certains notables de Qouraïch à rompre le pacte avec les leurs, et à restituer à la tribu des Banoû Hâchim le droit de rentrer chez eux.
C'est dans ce contexte de deuils, de persécutions et de répressions permanentes que l'événement d'al-issrâ' wa-l-mi'râj va avoir lieu, pour réconforter le Messager de Allah et les musulmans.
4. L'événement du voyage nocturne et de l'ascension (al issrâ wa-l-mi'râj) du Prophète, et la réaction d'Aboû Bakr
Allah (Que soit louée Sa Toute-Puissance) a dit : "Gloire à Celui Qui fit voyager Son serviteur la nuit, de la Sainte Mosquée à la Mosquée très éloignée dont Nous avons béni les abords afin de lui montrer certains de Nos Signes. Certes, Allah est, entre tous, L'Audient, L'Omniscient." (S17/V1).
Allah invita auprès de Lui Son Envoyé (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui). Cette rencontre avec Le Seigneur, fut le déclenchement d'une nouvelle phase de la mission prophétique : ce fut durant cette nuit céleste que Allah prescrivit la prière, moyen de renforcement fondamental de la foi, pour emplir le fidèle de l'omniprésence de Allah dans sa vie. Ce fut le voyage d'une nuit de la Mecque vers Al Qoudss (Jérusalem), où le Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) guida tous les messagers dans une prière commune, marquant ainsi le parachèvement de la religion divine par l'ultime message que Allah adressait à l'humanité. Quant à l'ascension, elle fut une rencontre intime avec le Seigneur : Allah dévoila à Son serviteur élu ce qu'il voulut de Ses Signes ; puis ce fut le retour sur la terre avec plus d'énergie, plus de confiance en la victoire de Allah.
En quoi consista l'événement d'al issrâ' wa-l-mi'râj ? D'après Mâlik Ibn Sa'sa' (Que Allah soit satisfait de lui et de son père), le Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) leur a parlé de ce qui s'est passé la nuit où il a été transporté vers la Mosquée d'al Aqsâ, puis son ascension vers les cieux :
"J'étais couché, j'étais entre l'éveil et le sommeil, et voilà que quelqu'un se présenta à moi (il s'agissait de l'ange Gabriel), qui m'ouvrit la poitrine, sortit mon cœur et le lava dans une cuvette en or, remplie de certitude et de foi (imân) ; il m'en remplit le cœur. Puis on fit venir une monture qui n'était pas un mulet, mais pourtant d'une race supérieure à l'âne, de couleur blanche..." (Le rapporteur du hadîth mentionna qu'il s'agissait de Bourâq).
"Le Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) dit ensuite : "Nous nous en allâmes ; j'étais toujours accompagné de Gabriel (Paix sur lui). Nous montâmes au ciel ;
les gardiens du premier ciel demandèrent : "Qui est-ce ?" Gabriel leur répondit que c'était Jibrâ'îl (Gabriel) en compagnie de Mohammad, qui avait été convié par Allah (Loué soit Son Nom). On nous ouvrit, ils me souhaitèrent la bienvenue, et on me présenta au premier ciel : mon père Adam (Paix sur lui) m'accueillit avec égards, en me disant : "Bienvenue à mon enfant pieux !" ; il en fut de même au deuxième ciel, où je vis les deux cousins Jésus ('Issâ) et Jean-Baptiste (Yahyâ) ; dans le troisième ciel, je vis Joseph (Yoûssouf) ; dans le quatrième, Enoch (Idrîss) ; dans le cinquième, Aaron (Hâroûn) ; dans le sixième. Moïse (Moussa), et dans le septième ciel, Abraham (Ibrâhim) ; puis je fus conduit vers la limite céleste (sidrat al mountahâ).
"L'ange Gabriel me laissa, me disant qu'il ne pouvait m'accompagner plus loin car, au-delà de cette limite, il serait consumé par l'apparition divine. J'entendis le bruit de la Plume {al qalam) inscrivant les décisions divines et les prédestinations. Là, je me prosternai devant mon Seigneur... Puis Allah me prescrivit cinquante prières. Lorsque je repassai auprès de Moïse, celui-ci me demanda combien de prières mon Seigneur m'avait prescrites ; je lui répondit : "Cinquante prières par jour". Il me recommanda de retourner auprès du Seigneur afin de demander un allégement pour ma communauté, car Allah avait prescrit moins que cela aux fils d'Israël, qui n'ont pas pu s'en acquitter!"
"Le Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) s'en retourna donc auprès de Allah, Qui réduisit les prières de dix, mais chaque fois Moïse demandait au Prophète de retourner auprès de Allah pour demander une diminution, et ce, jusqu'à ce que Allah prescrivît définitivement cinq prières par jour, dont le mérite serait cependant de cinquante prières." (IBN HICHAM, Sîra)
Le lendemain, lorsque le Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) informa les Qouraïchites de son voyage, ils se mirent à se moquer de lui. Mais Aboû Bakr, le sincère, celui qui connaissait la véracité de la parole de Mohammad et son honnêteté, dès qu'il fut informé des dires du Prophète, répondit : "S'il l'a dit, c'est que cela est vrai ! Je le crois déjà pour plus que cela, lorsqu'il me dit qu'il reçoit les nouvelles du ciel !" Dès ce jour, Aboû Bakr acquit le surnom d'as-Siddîq (le véridique).
5. al hijra (L'émigration du Prophète à Médine), et l’honneur accordé à Aboû Bakr d'être son compagnon du voyage
L'émigration du Prophète à Médine eut lieu le 12 Rabî' 1 / 622 apr. J. C.
Allah Le Très Haut a dit : "Ceux qui se joignirent au Prophète dans son exil, ceux qui se pressèrent de les accueillir, ceux qui les suivront dans la bonne voie, tous recueilleront en échange, la vive satisfaction de Allah. Ils Lui témoigneront la leur pour les bienfaits qu 'ils recevront de Sa Main généreuse. Il leur réservent ra auprès de Lui, et pour l'Eternité, des jardins baignés de ruisseaux. Triomphe incomparable, en vérité !" (S9/V100).
* *
Médine est une oasis fertile à quatre-cent-vingt kilomètres au nord de la Mecque par route, de nos jours. La population arabe de Médine (anciennement dénommée Yathrib), provenait de deux tribus "Al Awss" et "Al Khazraj".
Les habitants étaient fondamentalement des Arabes idolâtres, mais il y vivait aussi des juifs, détenteurs d'un livre sacré : la Thora. Ce voisinage des Arabes avec les juifs avait familiarisé les premiers avec des notions telles que la prophétie. Ainsi quand Mohammad se présenta aux pèlerins de Médine (Yathrib), six d'entre eux prêtèrent attention aux dires du Prophète Mohammad : grâce à leur perspicacité et à la pureté de leur esprit, en plus des données qu'ils détenaient des juifs sur la prochaine apparition d'un nouveau prophète, ils furent convaincus et ils se convertirent à l'Islam. Ils prêtèrent le serment d'allégeance en dehors de la Mecque, à un endroit appelé "Al 'Aqaba".
De retour chez eux, ils commencèrent à prêcher leur foi auprès des leurs ; leur connaissance était limitée, mais néanmoins, beaucoup répondirent favorablement à cet appel.
Un an après, lors du pèlerinage annuel à la Ka'ba, une délégation composée de douze personnes converties à l'Islam, se présenta auprès du Messager de Allah : dix de la tribu des Khazraj, et deux des Awss. Ces personnes prêtèrent le serment d'allégeance, au même endroit qui témoignait de l'adhésion volontaire et convaincue du premier groupe de convertis médinois à l'Islam.
Ces deux événements vont donner un souffle nouveau à la mission prophétique, et seront décisifs dans la vie des musulmans de la Mecque.
En effet, Mouss'ab (Que Allah soit satisfait de lui), que le Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) avait envoyé à Médine pour enseigner l'Islam aux nouveaux convertis, revint au bout d'un an pour annoncer au Messager de Allah l'adhésion massive de tous les Arabes de Yathrib (Médine) à l'Islam, à l'exception de trois familles seulement !
Ainsi les musulmans de la Mecque pouvaient-ils trouver à Médine un nouveau foyer, où des frères dans la foi étaient prêts à les accueillir et à les protéger ; alors Le Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) leur ordonna d'émigrer. Ils commencèrent à quitter la Mecque par petits groupes pour fuir la répression aveugle des Qouraïchites qui ne cessaient de s'amplifier ! Bientôt il ne resta plus à la Mecque que le Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) et sa famille, Aboû Bakr et sa famille, ainsi que les esclaves convertis à l'Islam, qui n'avaient pas pu se libérer de l'emprise de leur maître, ainsi que les femmes et les enfants.
Ce départ massif des musulmans inquiéta les Qouraïchites, ils décidèrent donc d'éliminer physiquement le Prophète de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui). Allah (Gloire à Lui) en informa Son Messager, en révélant : "(Et rappelle-toi), quand les mécréants complotaient contre toi, pour t'assassiner ou te bannir ; en vérité, ils complotaient, mais Allah est, certes. Celui qui est le plus capable de mettre en échec leur stratagème : il n'est plus sûres voies que celles de Allah !" (S8/V30).
Donc le départ des musulmans s'était effectué selon les directives du Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui), dans la plus grande discrétion, et dans la clandestinité. Seul, 'Omar Ibn Al Khattâb (Que Allah soit satisfait de lui) l'avait annoncé en public devant les Qouraïchites, en les défiant.
Quant à Aboû Bakr, chaque fois qu'il demandait la permission d'émigrer, le Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) lui ordonnait de rester, et il lui disait :
"Ne sois pas pressé ! Peut-être Allah te donnera-t-Il un compagnon !" (IBN HICHAM, Sîra)
Lorsque le Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) sut ce que les mécréants de la Mecque avaient décidé, et après que Allah (Gloire à Lui) lui eût permis d'émigrer à son tour, il contacta Aboû Bakr, son ami intime, et lui confia la charge de se doter des provisions nécessaires et de deux montures, puis il lui annonça qu'il serait son compagnon pour ce voyage accompli pour Allah. La joie d'Aboû Bakr fut immense, lui qui avait déjà acheté deux chamelles qu'il avait confiées aux soins d'un berger pour les faire paître, .dans l'attente d'un départ éminent !
Dans le dernier tiers de la nuit, le Prophète Mohammad (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) sortit de chez lui, à l'insu de ceux qui surveillaient sa maison, et prit la route de Médine, en compagnie de celui qu'il avait choisi pour être son compagnon : Aboû Bakr as-Siddîq.
Allah Le Très Haut dit, pour expliquer que ceux qui surveillaient la maison du Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) n'aient rien vu : "Nous avons placé devant eux une barrière, et derrière eux une barrière : les voilà aveuglés, ils ne peuvent rien voir !" (S36/V9).
Ce fut un voyage rempli de péripéties, durant lequel Aboû Bakr fit montre d'un attachement unique en son genre envers la personne du Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui). Al Hassan Ibn Abî Hassan Al Basrî a rapporté que lorsque le Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) prit le chemin de rémigration en compagnie d'Aboû Bakr, il se réfugia avec son compagnon dans la caverne de "Thawr", le temps de fausser les recherches des Qouraïchites. Lorsqu'ils arrivèrent près de la caverne, Aboû Bakr se précipita à l'intérieur pour vérifier s'il n'y avait pas quelque animal dangereux.
Quand Aboû Bakr avait pris le chemin avec le Messager de Allah, il avait emmené avec lui tout son argent, cinq ou six mille dirhams, pour les mettre au service de l'Envoyé de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) ; quand le Prophète le sut, il lui demanda : "Qu'as-tu laissé à ta famille ?" Et Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) répondit, avec la conviction de celui dont le cœur est rempli par l'omniprésence divine : "Je leur ai laissé Allah et Son Prophète !"
Aboû Bakr fit preuve d'une affection et d'une attention particulières à l'égard de la personne de l'Envoyé de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui). On a rapporté que tout le long du trajet vers Yathrib (Médine), tantôt il marchait devant le Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui), de crainte qu'un danger ne surgît de devant, et tantôt, se rappelant que le danger pouvait surgir de derrière, il se mettait derrière le Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) !
L'honneur que le Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) a accordé à Aboû Bakr as-Siddîq était justifié ; il fut le seul compagnon du Messager de Allah aux moments les plus délicats de sa mission, et les plus décisifs. Aboû Bakr savait ce que cela voulait dire et que tant d'honneur devait se mériter ; c'est pour cette raison qu'il ne faillit pas à sa responsabilité, et ne cessa de se montrer tout au long de sa vie à la hauteur de la confiance que lui avait accordée le Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui).
LA PARTICIPATION D'ABOU BAKR DANS LES BATAILLES CONTRE LES MECREANTS ET SES PRISES DE POSITION
Après tant de persécutions. Allah (Gloire à Lui) va ordonner à Son Messager de porter la bataille dans le terrain des mécréants ; après treize années d'infatigables efforts, et de prêche auprès des Mecquois, l'heure est arrivée pour défendre avec les armes la Vérité persécutée, et de faire payer aux mécréants leur oppression et leurs exactions.
Le 12 Safar en l'an 2 de l'hégire du Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui), Allah révéla : "Autorisation est donnée à ceux qui sont attaqués (de se défendre), parce qu'ils sont vraiment lésés ; et Allah est certes capable de les secourir. Ceux qui ont été expulsés de leurs demeures, sans qu 'ils aient commis aucune exaction, simplement pour avoir dit:
"Allah est notre Seigneur !"..." (S22/V39-40).
Le Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) mena lui-même les batailles contre les mécréants. La première fut celle d'"Al Abwa'" ou bataille de "Waddân". Elle se déroula au mois de Safar, douze mois après l'émigration à Médine. Au total, le Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) mena dix-neuf ghazwa ou batailles, sans compter celle de la reprise de la Mecque. Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) prit part à toutes ces batailles aux côtés du Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) ; il y fit preuve de bravoure et de courage. On a rapporté que 'Alî (Que Allah soit satisfait de lui) demanda un jour à des gens présents dans son assemblée :
"Dites-moi quelle est la personne la plus courageuse d'entre tous (les musulmans) ?" Ils lui répondirent : "C'est toi !" Il dit :
"C'est vrai ! Chaque fois que je me suis trouvé en combat contre quelqu'un, toujours je suis sorti gagnant ! Mais cependant dites moi, qui est l'homme le plus courageux ?" Ils répondirent :
"Nous ne savons pas !" Alors 'Alî dit ; "C'est Aboû Bakr ! Le jour de la bataille de Badr, nous avions installé pour le Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) un auvent pour qu'il fût à l'ombre du soleil, et nous nous demandâmes qui se chargerait de le protéger d'attaques surprises des Qouraïchites. C'est Aboû Bakr qui se proposa pour cette mission périlleuse : il se tint à la hauteur du Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui), tenant son épée à la main, et chaque fois qu'un Qouraïchite s'approchait du Prophète, il lui tombait dessus. Certes, Aboû Bakr est l'homme le plus courageux !" (Rapporté par AL BAZZAR)
Lors de la bataille de Badr, l'un des fils d'Aboû Bakr, qui n'avait pas adhéré au message de l'Islam, se battait du côté des mécréants de la Mecque, contre les musulmans. Lorsqu'il se convertit par la suite, il dit un jour à son père : "0 père ! A Badr, à deux reprises, tu as été à "portée de mon épée, mais mon amour filial m'empêcha de te tuer !" Alors Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) lui dit : "Mon fils, si moi, j'avais eu une telle occasion, tu ne t'en serais pas sorti sain et sauf !" Cette fermeté d'Aboû Bakr mous montre combien était grande sa fidélité envers Allah et Son Messager. Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) a pu concrétiser cette qualité qui garantit à l'individu de pouvoir goûter au plaisir immense de la foi, c'est: "que Allah et son Prophète soient plus chers à ton cœur, que toute autre chose..." (Rapporté par BOUKHARI)
Pendant les pourparlers qui aboutirent au traité d'Aï Houdaï-biya, en l'an 6 de l'hégire, Aboû Bakr était à côté du Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui). Le porte-parole des Mecquois était 'Orwa Ibn Mass'oûd Ath-Thaqâ-fî ; dans la discussion, il tentait de faire renoncer le Messager de Allah à entrer dans les lieux saints et lui dit : "Par Allah, je prévois que ces Compagnons qui te soutiennent vont te délaisser demain, car si tu savais ce que Qouraïch a préparé pour t'empêcher d'y entrer !" Alors Aboû Bakr l'insulta en humiliant leur divinité et lui répliqua : "Crois-tu que nous allons abandonner l'Envoyé de Allah !" Cette réaction d'Aboû Bakr montre à quel degré cet homme réputé pour sa gentillesse savait s'imposer pour défendre l'honneur du Prophète de Allah, et devenait intraitable pour ce qui était de sa conviction.
Aboû Bakr fut un des témoins du traité d'Aï Houdaïbiya qu'a ratifié du côté de Qouraïch Sahl Ibn 'Amr des Banoû 'Amir Ibn Lou'aï. Le délégué mecquois, nous rapporte-t-on, était très surpris de la fermeté d'Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui), lui qui était réputé auparavant pour sa douceur !
La dernière campagne du Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) fut celle de Taboûk ; elle a opposé les musulmans aux Byzantins. Le Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) demanda à ses Compagnons et aux musulmans en général de s'investir complètement dans cette bataille décisive et d'apporter une aide maximale. Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui), à son habitude, là encore excella et fit preuve d'un sacrifice unique pour la cause de Allah : il déposa tout son argent et tout ce qu'il possédait devant le Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui), ce qu'il lui valut la satisfaction du Prophète qui le désigna comme porte-étendard de cette expédition.
Aboû Houraïra (Que Allah soit satisfait de lui) a rapporté que le Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) a dit : "Toute personne qui m'a prêté main forte, j'ai pu l'en récompenser, excepté Aboû Bakr : il a eu pour moi tant de bienfaits, que seul Allah saura l'en récompenser au Jour du Jugement dernier, et en vérité, il n'y a pas d'argent qui m'ait été aussi utile, comme l'a été l'argent d'Aboû Bakr !" (Rapporté par TIRMIDHI)
Ibn Kathîr a rapporté d'après Ibn 'Abbâss, Anass, 'Alî, Jâbir Ibn 'Abd-Allâh et Aboû Sa'îd Al Khoudri (Que Allah soit satisfait d'eux), que le Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) disposait de l'argent d'Aboû Bakr comme s'il était le sien !"
LES MERITES D'ABOU BAKR ET SA SCIENCE.
Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) se comptait au nombre des savants parmi les Compagnons du Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui).
1. Ce que l'on a rapporté de lui
Ibn Sa'd a rapporté que lorsqu'on a demandé à Ibn 'Omar (Que Allah soit satisfait de lui) quels étaient les Compagnons qui étaient réputés par leur savoir, et à qui on s'adressait pour obtenir des réponses juridiques (fatâwa}, il répondit : "Seuls Aboû Bakr et 'Omar avaient l'habitude de le faire, du vivant du Prophète de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) !"
Dans une autre version. Al Qâssim Ibn Mohammad a rapporté qu'Aboû Bakr, 'Omar, 'Othmân et 'Alî avaient coutume de donner des réponses juridiques du vivant du Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui).
Ibn Kathîr a dit : "Aboû Bakr était le plus savant dans le Livre de Allah parmi les Compagnons, car il est arrivé au Messager de Allah de le désigner pour diriger la prière à sa place, or le Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) a dit par ailleurs : "Celui qui guide les autres dans la prière doit être le plus savant d'entre eux !"
'Aïcha (Que Allah soit satisfait d'elle) a rapporté que l'Envoyé de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) a dit : "II ne peut être question, lorsqu' Aboû Bakr est présent dans un groupe, que ce soit quelqu'un d'autre que lui qui dirige la prière !" (Rapporté par TIRMIDHI)
L'imâm An-Nawawî a rapporté qu'Aboû Bakr faisait partie des Compagnons qui avaient mémorisé la totalité du Coran.
En plus, il était l'un des plus savants dans la sounna du Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui), car il fut le Compagnon du Prophète de Allah, du début de sa mission prophétique jusqu'à sa mort. Et si nous n'avons pas beaucoup de hadîth rapportés par lui, c'est qu'il n'a pas vécu longtemps après le Prophète, et que les charges de l'Etat qui lui ont été confiées ne lui ont pas laissé de temps pour l'enseignement et la transmission.
Ibn Kathîr a rapporté qu'Aboû Bakr était quelqu'un de très éloquent, et sa réputation est confirmée en la matière.
Al’imâm Ahmad Ibn Hanbal a affirmé que la oumma (la communauté) considère à l'unanimité que le meilleur des hommes après le Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui), est Aboû Bakr, puis 'Omar.
Tirmidhî a rapporté que 'Omar Ibn Al Khattâb (Que Allah soit satisfait de lui) a dit : "Aboû Bakr est notre "maître", et il est le meilleur d'entre nous tous. Il était le plus aimé d'entre nous par le Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui)."
'Abd-Allâh Ibn Chaqîq a raconté avoir demandé à 'Aïcha (Que Allah soit satisfait d'elle) qui d'entre les Compagnons était le plus aimé par le Prophète de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) ?" Elle répondit : "Aboû Bakr !" -"Puis qui ?" - Elle répondit : "Puis 'Omar !" - "Puis qui ?" - Elle répondit : "Puis 'Oubaïda Ibn Al Jarrâh". (Rapporté par NAS-SA'I et AL HAKIM)
2. Les versets coraniques révélés à son sujet
Allah (Qu'il soit loué) a dit : "...Si vous ne lui portez pas secours... Allah l'a déjà secouru, lorsque ceux qui avaient mécru l'avaient banni, deuxième de deux. Quand ils étaient dans la grotte et qu'il disait à son compagnon : "Ne t'afflige pas, Allah est avec nous !" (S9/V40). Les musulmans disent à l'unanimité que le Compagnon dont il est question ici est Aboû Bakr.
Allah Le Très Haut a dit aussi : "...Allah fit descendre sur lui Sa sérénité..." (S9/V40). "Sur lui", c'est-à-dire sur Aboû Bakr.
Allah Le Très Haut a dit : "Quant à celui qui donne et craint Allah, et déclare véridique la voie de la bonne récompense, Nous lui faciliterons la voie de l'aisance... " (S91/V5-7). Ibn Mass'oûd a dit au sujet de cette sourate, qu'il s'agissait d'Aboû Bakr lorsqu'il racheta Bilâl (que Allah soit satisfait de lui) à Oumayya et Oubaï Ibn Khalaf, puis Aboû Bakr lui rendit sa liberté.
Et quand Allah a dit : "...Certes, vos œuvres sont divergentes!" (S91/V4). C'est-à-dire : les œuvres d'Aboû Bakr et celles d'Ou-mayya et d'Oubaï ne sont pas, certes, les mêmes !
Ibn Jarîr a rapporté, d'après 'Amir Ibn 'Abd-Allâh Ibn Az-Zoubaïr, qu'Aboû Bakr avait l'habitude de racheter de vieilles personnes esclaves qui se convertissaient à l'Islam, ainsi que les femmes, et les affranchissait ensuite ; alors son père lui dit :
"Mon fils ! Si tu rachetais des hommes forts et que tu les libères, ce serait mieux pour toi, car ils pourraient te défendre, et repousser de toi toute nuisance !" Aboû Bakr lui répondit : "0 père, je ne cherche que ce qui est auprès de Allah !" C'est alors que Allah révéla : "...Quant à celui qui donne et craint Allah, et déclare véridique la voie de la bonne récompense, Nous lui faciliterons la voie de l'aisance..." (S91/V5-7).
D'après 'Abd-Allâh Ibn Az-Zoubaïr,'c'est au sujet d'Aboû Bakr que Allah a révélé ce verset : "...Celui qui emploie ses richesses pour faire le bien et qui se purifie... Il n'accorde ses bienfaits qu 'en cherchant la Face de son Maître Le plus Elevé, et il sera très certainement satisfait." (S91/V 18-21). (Rapporté par AL BAZZAR)
'Aïcha (Que Allah soit satisfait d'elle) a raconté que jamais Aboû Bakr n'a failli à un serment, jusqu'à ce que Allah révèle le jugement se rapportant à l'expiation des serments {Kaffârat al yamîn)1:' (Rapporté par BOUKHARI) Voir S5/V89, au sujet de l'expiation du serment non tenu.
Oussaïd Ibn Safwân a rapporté que 'Alî ( Que Allah soit satisfait de lui) a dit : "Concernant la Parole de Allah : "Celui qui apporta la Vérité...", il s'agit ici de Mohammad ; puis Allah ajoute : "...et celui qui y crut" (S39/V33), il s'agit alors d'Aboû Bakr." (Rapporté par AL BAZZAR et IBN 'ASSAKIR)
Quant au verset : "...Consulte-les sur toute chose. " (S3/V159). Ibn 'Abbâss a dit : "II s'agit d'Aboû Bakr et de 'Omar Ibn Al Khattâb." (Rapporté par AL HAKIM)
Ibn Chawdhab a dit : "A propos de la Parole de Allah : "Ceux, au contraire, qui auront été hantés par la crainte de leur Seigneur auront deux paradis (jardins)" (S55/V46), Allah annonce à travers ce verset la bonne nouvelle à Aboû Bakr." (Rapporté par IBN ABI HATIM)
Au sujet de la Parole de Allah : "...Si au contraire vous cherchez à conjurer contre lui, sachez alors que Allah est Son Allié, et qu'il a derrière lui, comme soutiens, Gabriel et les vertueux d'entre les croyants. " (S66/V4). D'après Ibn 'Abbâss et Ibn 'Omar, ce verset a été révélé au sujet d'Aboû Bakr et de 'Omar. (Rapporté par TABARANI)
'Abd-Allâh Ibn Houmaïd a rapporté dans son exégèse, d'après Moujâhid, que lorsque Allah a révélé le verset suivant : "Certes, Allah et Ses Anges prient sur le Prophète.." (S33/V56), Aboû Bakr a dit : "0 Messager de Allah, chaque fois que Allah te donne du bien. II nous y associe !" Alors Allah Le Très Haut a révélé : "C'est Lui (Allah), qui prie sur vous, ainsi que Ses Anges pour vous faire sortir des ténèbres vers la lumière. " (S33/V43).
Quant à la Parole de Allah : "Et Nous avons recommandé à l'Homme d'être bon envers ses parents. Sa mère le porte dans la douleur, et l'enfante dans la douleur, gestation et sevrage durent trente mois ; puis quand il atteint sa maturité, à l'âge de quarante ans, il dit : "Seigneur ! Inspire-moi pour que je Te rende grâce pour Tes bienfaits ainsi que pour Tes bienfaits envers mes parents. Et dirige-moi pour accomplir des œuvres pies, qui Te rendent satisfait de moi, et bénis ma descendance pour qu 'elle soit vertueuse. Je me repens à Toi, et je me range au côté des soumis. De tels hommes Nous agréerons les meilleurs de leurs actes, et Nous passerons outre les moins bons. Ils seront parmi les gens du Paradis de par la Promesse de Vérité qui leur a été faite." (S46/V15-16), Ibn 'Abbâss a dit : "Ce verset a été révélé au sujet d'Aboû Bakr." (IBN 'ASSAKIR)
Ces attestations de Allah Le Très Haut en faveur de la personne d'Aboû Bakr montrent clairement que le choix, que les musulmans firent par la suite pour le désigner à la tête de la communauté, était justifié. Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) va se montrer digne de cette élection, continuer l'œuvre du Prophète de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui), et veiller à l'unité de la oumma.
L'ELECTION D'ABOU BAKR
1. Les indices sur la désignation d'Aboû Bakr
Nombreux sont les hadîth du Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui), qui manifestement le désignaient comme son successeur direct à la tête de la communauté. En plus, à de nombreuses occasions, le Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) a montré sa préférence envers Aboû Bakr pour diriger les musulmans dans les prières ; ainsi pendant sa dernière maladie, il fut tellement affaibli qu'il ne put se rendre à la mosquée pour guider les gens dans la prière, alors le Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) désigna Aboû Bakr pour cette charge, malgré les recommandations de 'Aïcha afin que le Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) le décharge de cette responsabilité ; 'Aïcha (Que Allah soit satisfait d'elle) a justifié son intervention, afin que le Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) nommât quelqu'un d'autre, en expliquant que son père (Aboû Bakr) était un homme très sensible, qui pleurait facilement pendant la prière et que les musulmans risquaient de ne pas entendre sa voix ! Mais le Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) insista et se mit même en colère. (Rapporté par BOUKHARI et MOUSLIM)
Un jour où Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) était absent, le Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) ordonna aux musulmans de prier sans lui ; alors, on demanda à 'Omar de s'avancer pour diriger la prière. Quand le Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) entendit la voix de 'Omar, il se fâcha et dit : "Non ! Nop ! Non ! Allah et les musulmans ne veulent qu'Aboû Bakr pour diriger la prière !" {hadîth moutawâtir), rapporté aussi par 'Aïcha, Ibn Mass'oûd, Aboû Sa'îd, Hafsa, 'Alî Ibn Abî Tâlib, et Ibn 'Abbâss (Que Allah soit satisfait d'eux tous).
Après que les musulmans eurent repris la Mecque aux mécréants de Qouraïch, en l'an 8 de l'hégire, le Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) désigna Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) pour diriger les musulmans dans l'accomplissement des rites au premier pèlerinage (hajj) sous l'Islam de l'année suivante.
Houdhaïfa (Que Allah soit satisfait de lui) a rapporté que le Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) a dit : "Prenez exemple sur ceux qui viendront après moi : Aboû Bakr et 'Omar !" (Rapporté par TIRMIDHI et AL HAKIM)
'Abd-Allâh Ibn 'Omar (Que Allah soit satisfait de lui et de son père) a rapporté avoir entendu le Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) dire : "Onze califes me succéderont ; quant à Aboû Bakr, il restera peu de temps !" (Rapporté par AL BAGHAWI, avec une chaîne de transmission jugée bonne (hassan)).
Lors de sa maladie, le Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) a dit : "Fermez toutes les portes des maisons privées qui donnent sur l'intérieur de la mosquée, et ne laissez parmi elles que la porte d'Aboû Bakr !" (Rapporté par IBN 'ADIY, d'après Anass Ibn Mâlik). Ce hadîth est appuyé par des versions similaires rapportées par BOUKHARI, MOUSLIM, TIRMIDHI, TABARANI et Al BAZZAR.
Les savants musulmans sont unanimes à considérer que ces hadîth désignent clairement et sans ambiguïté Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui), pour succéder au Prophète de Allah, à la tête de la communauté.
Joubaïr Ibn Mout'im a rapporté d'après son père (Que Allah soit satisfait de lui) qu'une femme s'est présentée auprès du Prophète de Allah (pour affaire) ; le Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) lui dit de revenir une autre fois. La femme lui demanda : "...Et si je ne te retrouvais plus (en vie) ! ?" Alors le Messager de Allah lui dit : "Si tu ne me trouvais plus, adresse-toi alors à Aboû Bakr." (Rapporté par BOUKHARI et MOUSLIM)
On a demandé à 'Aïcha (Que Allah soit satisfait d'elle) : "Si le Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) avait pu désigner quelqu'un à sa succession, qui aurait-il pu choisir ?" Elle répondit : "Cela aurait été Aboû Bakr !" On lui demanda : "Puis qui ?" Elle répondit : '"Omar !" On lui demanda: "Puis qui ?" Elle. répondit : "Aboû 'Oubaïda Ibn Al Jarrâh !" (Rapporté par MOUSLIM)
Tous ces hadîth démontrent la prééminence d'Aboû Bakr sur l'ensemble des Compagnons (Que Allah soit satisfait d'eux tous).
Uimâm Châfi'î (Paix à son âme) a dit : "Toute la communauté était unanime quant à l'accession d'Aboû Bakr au califat, car après la mort du Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui), il était nécessaire que la communauté ait un chef, et on n'a pas trouvé un homme meilleur qu'Aboû Bakr, et c'est pour cela qu'ils lui ont prêté serment d'allégeance !" (Rapporté par AL BAIHAQI)
* * *
L'amour qu'éprouvaient les musulmans envers le Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) était unique, et quand l'Envoyé de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) rendit le dernier soupir, le choc fut terrible. Le décès du Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) stupéfia tout le monde, les réactions étaient empreintes de douleur, et parfois vides de toute logique. Ainsi 'Omar Ibn Al Khattâb (Que Allah soit satisfait de lui) tira son épée et déclara : "Le Messager de Allah n'est pas mort, il est allé vers Son Seigneur, comme le fut Moïse, et il va revenir ! Celui qui dira que Mohammad est mort, je lui trancherai la tête !"
Quand le Messager de Allah est mort, Aboû Bakr n'était pas là: après lui avoir demandé la permission, il était parti pour rendre visite à son épouse, en dehors de Médine ; lorsqu'on l'envoya chercher, il entra dans la maison du Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui), le salua, l'embrassa sur le front et dit : "Par mon père et ma mère que je sacrifierais pour toi ! Tu sens bon ; tu le sentais de ton vivant, et même mort ! Par le Seigneur de la Ka'ba ! Mohammad est mort !"
Quand il entra dans la mosquée, et entendit 'Omar menacer toute personne qui affirmerait la mort de l'Envoyé de Allah, il interpella les musulmans et leur dit : "0 peuple ! Que ceux d'entre vous qui adoraient Mohammad, sachent que Mohammad est mort ! Quant à ceux qui adorent Allah, qu'ils sachent que Allah est Vivant et ne meurt pas ; puis il a récité la Parole de Allah : "En vérité, Mohammad n'est qu'un messager, comme d'autres messagers qui l'ont précédé. Si jamais il mourait ou venait à être tué, seriez-vous hommes à retourner sur vos pas, et à vous déclarer renégats ? Quiconque le fait, ne nuira en rien à Allah ; et Allah récompensera, à leur juste valeur, les personnes reconnaissantes." (S3/V144).
Ce discours d'Aboû Bakr eut un effet direct sur les musulmans, car il leur a rappelé une vérité dogmatique qu'ils avaient oubliée dans ce moment de deuil : c'était que Mohammad était un mortel, et que la vraie foi se mesurait face à une telle épreuve! Le Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) n'avait-il pas dit : "La patience, c'est lors du premier choc !" (Rapporté par AHMAD et d'autres)
2. Son élection
'Omar Ibn Al Khattâb (Que Allah soit satisfait de lui) a dit lors de son sermon, à son retour du pèlerinage : "J'ai appris que l'un d'entre vous avait dit qu'après la mort du Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) il ferait acte d'allégeance à Untel ; car la désignation d'Aboû Bakr n'était d'après lui qu'une erreur, qui s'était accomplie ! Et c'est vrai, qu'elle s'est accomplie ainsi, et Allah a préservé (la communauté) de ses conséquences néfastes. Aujourd'hui, il n'y a personne d'entre vous à qui tout le monde soit prêt à obéir comme à Aboû Bakr ! Il était le meilleur d'entre nous lorsque le Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) a rendu le dernier soupir ! 'Alî et Zoubaïr étaient restés chez Fâtima. Les ansâr (Médinois), eux, s'étaient tous réunis dans la saqîfa des Banoû Sâ'ida, tandis que les mouhâjiroûn (Mecquois) s'étaient ralliés à Aboû Bakr, et s'étaient rassemblés autour de lui. Alors je lui suggérai que nous allions chez nos frères les ansâr ; c'est ce que nous fîmes. Sur le chemin, nous avons rencontré deux hommes pieux ; ils nous ont informé de ce que les gens étaient en train de discuter, et d'élaborer (comme décision au sujet de la succession du Prophète). Puis ces deux personnes nous ont recommandé de ne pas y aller et de mettre à exécution notre propre décision. Mais nous nous sommes présentés quand même chez les ansâr. Là-bas, nous aperçûmes un homme enveloppé dans une couverture. Nous demandâmes qui c'était : on nous répondit que c'était Sa'd Ibn 'Oubâda qui était malade. Lorsque nous nous asseyâmes, un des intervenants des ansâr se leva et, après avoir loué Allah, dit : "Nous sommes les alliés de Allah, et les cavaliers de l'Islam ! Quant à vous les émigrants {al mouhâjiroûn}, vous êtes un groupe d'entre nous ! et voilà que des gens d'entre vous veulent prendre l'affaire en main, et nous exclure !" Lorsqu'il eut terminé j'ai voulu prendre la parole, et exprimer une position, dont j'avais bien préparé le texte, mais Aboû Bakr, qui était plus patient que moi, et envers qui j'avais du respect, me demanda de patienter ; alors je n'ai pas voulu le contredire au risque de le fâcher, et je me tus ;
Aboû Bakr était en effet plus savant que moi. Il prit la parole. Par Allah ! Il a cité toutes les idées auxquelles j'avais pensé, et les a mieux développées ! Il a dit : "Tout ce que vous avez dit sur vos mérites (à vous, les ansâr) est juste ; cependant tout le monde est unanime pour reconnaître que la direction (des musulmans) revient à ces gens de Qouraïch ; et quant à moi, je choisis pour vous l'un de ces deux hommes : 'Omar Ibn Al Khattâb ou Aboû 'Oubaïda Ibn Al Jarrâh !" ('Omar dit :) "De tout ce qu'il a dit c'est cette phrase qui m'a déplu, car comment aurais-je pu diriger des gens parmi lesquels il y aurait eu Aboû Bakr ! Par Allah ! il m'est préférable que l'on me coupe la tête que d'accepter une telle décision ! Alors un homme des ansâr se leva et dit:
"Que l'on désigne deux califes, un parmi les ansâr, et l'autre parmi les mouhâjiroûn ! La discussion s'envenima, et le ton monta, et nous avons eu peur que l'on se sépare sans qu'il y ait un accord entre les musulmans, ce qui aurait été une porte ouverte devant toute forme de discorde et de crise. Alors je me suis levé et j'ai dit à Aboû Bakr : "Tends la main pour que je te prête serment d'allégeance ! Il a tendu la main, j'ai prêté le serment, les mouhâjiroûn firent de même, et les ansâr les suivirent. Je jure par Allah, que nous n'avions pas d'autre issue, pour le bien de la communauté, que d'élire Aboû Bakr (Rapporté par BOUKHARI et MOUSLIM)
Dans une autre version, il est dit qu'Aboû 'Oubaïda Ibn Al Jarrâh se leva et dit : "0 vous les ansâr, vous avez été les premiers alliés de l'Islam, alors ne devenez pas les premiers à changer dans la religion de Allah et à innover !" Alors Bachîr Ibn Sa'd (le père de Nou'mân Ibn Bachîr), se leva et dit : "0 vous les ansâr ! Si nous avons eu le mérite de nous battre pour la cause de Allah contre les mécréants, et d'être parmi les premiers musulmans, en vérité, nous l'avons fait dans l'unique but de plaire à Allah, et par obéissance à notre Messager : nous avons œuvré pour notre devenir ! C'est à Allah que revient ce bienfait en notre faveur ! Sachez que Mohammad (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) était de Qouraïch, et les siens ont davantage de droits ; et par Allah, Allah ne me verra jamais me quereller avec eux à ce sujet ! Craignez Allah, et ne divergez pas avec eux, et ne leur discutez pas cette autorité." Aboû Bakr se leva et dit : "Voici 'Omar, et voici Aboû 'Oubaïda ! Choisissez celui que vous voulez d'entre les deux !" Mais ils se levèrent et dirent, tous deux : "Non, par Allah ! Nous ne reconnaissons pas ce droit à quiconque d'autre que toi ! Tu étais le meilleur d'entre les mouhâjiroûn, et tu étais l'un des deux dans la caverne en compagnie du Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui). Le Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) t'a désigné pour lui succéder dans la direction de la prière ; et la prière est le fleuron de la religion! Qui pourra prétendre être capable de te diriger, ou de gérer les affaires sinon toi ? Tends la main pour que l'on te fasse allégeance. Alors Bachîr Ibn Sa'd se précipita et lui a fait le premier allégeance". Lorsque les Awss virent ce qu'avait fait Bachîr Ibn Sa'd, ils prêtèrent le serment d'allégeance à leur tour, et reconnurent à Aboû Bakr cette élection ; tous firent de même, excepté Sa'd Ibn 'Oubâda, 'Alî et les Banoû Hâchim, qui étaient occupés à préparer les funérailles du Prophète de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui).
3. Le premier sermon (TAboû Bakr
Anass Ibn Mâlik a raconté qu'après l'élection d'Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) dans la saqîfa des Banoû Sâ'ida, Aboû Bakr tint une assemblée générale avec les musulmans, le lendemain, dans la mosquée ; alors 'Omar se leva, il loua Allah et Lui rendit grâce, puis dit : "Allah a unifié votre affaire sous la bannière du meilleur des Compagnons du Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui), de celui qui fut l'un des deux dans la caverne : levez-vous et prêtez-lui allégeance." Alors les gens se levèrent et ce fut la bai1 a (serment d'allégeance) publique, où toute la communauté a ratifié cette élection. Ensuite Aboû Bakr se leva, il loua Allah, selon l'usage, puis dit :
"0 peuple ! J'ai été désigné à votre tête, et je ne suis pas, certes, le meilleur d'entre vous. Si je fais bien, aidez-moi ! Si j'agis mal, corrigez-moi ! La vérité est un dépôt qui m'a été confié pour un temps {amânat) : j'y veillerai ! Et le mensonge, c'est de la traîtrise! Le plus faible d'entre vous sera puissant auprès de moi, jusqu'à ce que je lui obtienne son droit ; et le puissant d'entre vous sera faible (sans valeur) auprès de moi, jusqu'à ce que je lui arrache le droit qui revient aux autres, et ce par la volonté de Allah ! 0 Gens ! Ecoutez-moi : chaque fois qu'un peuple délaisse le combat pour Allah {al jihâd), Allah lui inflige l'humiliation ! Et chaque fois que le vice se répand dans un peuple. Allah l'éprouve par des calamités ! Obéissez-moi, aussi longtemps que j'obéirai à Allah et aux directives de Son Messager ; mais si je désobéis à Allah, vous ne me devrez plus aucune obéissance. Levez-vous pour la prière, que Allah vous bénisse !" (IBN ISHAQ, Sîra)
Hassan Al Basrî (Que Allah lui fasse miséricorde) a rapporté:
"Après que tout le monde ait prêté le serment d'allégeance, Aboû Bakr s'est levé et a prononcé ce discours : "J'ai été chargé de cette responsabilité sans l'avoir souhaité ! Par Allah ! combien j'ai souhaité que quelqu'un d'entre vous m'en décharge ; vous m'avez chargé de me comporter envers vous comme le Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) le faisait. Je ne puis agir de même, car le Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) a été appuyé par la Révélation Cal Wahy), grâce à laquelle il était préservé de l'erreur ! Tandis que moi, je ne suis qu'un simple humain, et je ne suis pas meilleur que l'un quelconque d'entre vous. Alors surveillez-moi ! Si vous me voyez sur le droit chemin, suivez-moi ; et si vous voyez que je m'éloigne du droit chemin, corrigez-moi !" (IBN SA'D, Tabaqât)
D'après une autre version, il aurait dit : "0 gens ! Vraiment, je suis comme quiconque d'entre vous ! Je ne sais pas si vous n'allez pas compter sur moi pour accomplir tout ce que le Messager de Allah avait la capacité de faire ! Sachez que Allah a choisi Mohammad (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) entre toute l'humanité, et qu'il l'a préservé de toute erreur ; quant à moi, je ne fais que le suivre, et je ne suis pas un innovateur ! Si vous me voyez sur le droit chemin, suivez-moi, et si je m'en éloigne, alors corrigez-moi !"
Ainsi Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) va marquer de l'empreinte de la sincérité son élection, en affirmant que le rôle de l'autorité est, en vérité, de servir la cause de Allah, de continuer l'œuvre du Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui), et de veiller aux intérêts de la communauté, en toute équité. Les événements qui vont jalonner la période de son califat, attesteront de la véracité des dires d'Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui). Il ne faillira pas à sa tâche, et surprendra même les Compagnons du Prophète par sa fermeté dans ses prises de position, et son analyse profonde des situations les plus graves (Que Allah soit satisfait de lui, et le comble de Ses bienfaits).
L'OEUVRE D'ABOU BAKR
1. L'expédition de l'armée d'Oussama Ibn Zaïd
Avant sa mort, le Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) avait décidé d'envoyer Oussama Ibn Zaïd à la tête d'une armée pour punir les tribus arabes situées aux confins de la Syrie, pour le soutien qu'elles avaient apporté aux Byzantins, lors de la bataille de "Mou'ta"1. Par la même occasion, Oussama vengerait les musulmans morts lors de cette bataille, parmi lesquels figurait son père, Zaïd Ibn Thâbit (Que Allah soit satisfait de lui).
Alors que l'on préparait l'expédition, le Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) était tombé malade puis mourut. L'expédition avait donc été retardée, le temps de l'instauration du nouveau pouvoir exécutif. Après son élection, la première décision d'Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) fut la mise en œuvre de cette entreprise.
Mais voilà que certaines tribus qui avaient embrassé l'Islam, et dont la foi n'était pas solide, commencèrent à manifester des doutes et des signes d'abandon de certaines des prescriptions de l'Islam. Ils pensaient que la mort du Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) signifiait la fin de l'Islam! En plus, certains qui n'avaient pas saisi la sagesse de l'Islam dans les prescriptions se rapportant à la distribution de la richesse collective, mirent en doute la nécessité de tels commandements ! Ils ont considéré la zakât comme une forme de taxe que Mohammad (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) leur avait imposée à la manière des rois !
D'autres ont profité de la mort du Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) pour prétendre à sa succession, et ont même proclamé qu'ils étaient eux-mêmes de nouveaux prophètes ! Parmi eux nous citons : Toulaïha Al.
La bataille de Mou'ta s'est déroulée au mois de Joumâdâ de l'an 8 de l'hégire.
Assdî, Al Asswad Al 'Anssî, Mousaïlima al Kadhdhâb ("Le menteur"), Sajjâj la Tamimite, etc.
C'est dans ce contexte de désordre qui réclamait que l'on prenne fermement en mains la direction de l'Etat, mais aussi que l'on continue à propager le message de Allah, pour reléguer à jamais l'associationisme (chirk), que le calife Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) a décidé l'envoi de l'expédition d'Oussama.
Aboû Bakr se trouvait dans une situation difficile, mais il se devait, par amour envers le Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) et parce qu'il était confiant dans la sagesse des décisions du Prophète, d'exécuter et de ratifier cette entreprise au risque de laisser la Mecque et Médine sans défense.
Certains Compagnons lui demandèrent d'annuler l'expédition; d'autres lui demandèrent de démettre Oussama de cette charge, prétextant en cela son jeune âge, car il n'avait, à ce moment-là, que 18 ans ! Ils voulaient qu'un autre plus âgé soit désigné, surtout qu'un nombre important des plus éminents Compagnons du Prophète, tels que 'Omar, se retrouvaient sous ses ordres. Mais Aboû Bakr leur répondit : "Je jure par Celui Qui détient mon âme dans Sa Main ! Même si je savais que les animaux sauvages allaient me charger et faire de moi leur proie (parce que Médine se retrouverait sans défense), je ratifierais l'envoi de l'armée d'Oussama !" Aboû Bakr dit à ceux qui voulaient qu'Oussama soit déchargé de cette responsabilité : "Quel droit ai-je, moi, de renvoyer un homme choisi par le Messager de Allah ? !" et il se fâcha contre 'Omar, allant jusqu'à lui tirer la barbe, et lui dit : "Que ta mère te perde ! Tu me demandes de congédier un homme que le Messager de Allah avait désigné !"
Aboû Bakr voulait, en maintenant cette décision, combattre ce sentiment de la période préislamique {al jâhiliyya) où l'on estimait les gens en fonction de leur âge, mais aussi de leur statut social. Rappelons que le père d'Oussama, Zaïd Ibn Hâritha (Que Allah soit satisfait d'eux deux), était un esclave que la mère des croyants Khadîja (Que Allah soit satisfait d'elle) avait offert au Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) après leur mariage. Le Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) l'affranchit et le traita comme son propre fils. D'où ce sentiment de mépris qui avait persisté dans l'esprit de certains Arabes, et qu'Aboû Bakr a voulu combattre en maintenant la décision du Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui). Il confirma par là que la valeur des êtres humains avait une autre base que celle de la filiation, celle de la piété et du savoir-faire, comme l'a dit Allah Le Très Haut : "Le plus noble d'entre vous, auprès de Allah, est le plus pieux d'entre vous. Allah est Celui Qui sait et Qui est bien informé." (S49/V13).
Trois semaines après la mort du Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui), l'expédition d'Oussama prit la route. Et c'est l'occasion de constater la modestie du calife Aboû Bakr :
- En premier lieu, il demanda la permission à Oussama, le chef de l'expédition, de pouvoir garder 'Omar Ibn Al Khattâb à ses côtés, pour lui demander conseil et s'appuyer sur lui dans les moments difficiles que connaissait la communauté ;
- Aboû Bakr accompagna l'armée jusqu'à la sortie de Médine : le jeune chef de l'armée était à cheval, et Aboû Bakr, tenant les rênes du cheval, allait à pied ! Oussama lui demanda : "0 successeur du Prophète de Allah ! Monte aussi sur un cheval, ou alors permets-moi de descendre !" Aboû Bakr lui dit : "Par Allah ! Je ne consentirai à accepter aucune de tes deux propositions ! En quoi cela peut-il me nuire si je me salis les pieds dans la poussière, si c'est pour la cause de Allah !" Puis il donna ces directives à l'armée : "Ne vous comportez pas en traîtres ! Ne mutilez pas (vos ennemis), ne tuez ni enfant, ni vieillard, ni femme. N'abattez pas et ne brûlez pas les palmeraies, ni les arbres fruitiers. Ne tuez ni mouton, ni vache et ni chameau, sauf pour vous nourrir. Vous allez passer près de gens qui se sont retirés du monde pour s'adonner à la retraite (des moines chrétiens) : laissez-les tranquilles à leur vocation...". Puis il leur dit : "...Partez au Nom de Allah !"
Oussama mena sa campagne, par la Volonté de Allah, avec succès. Il attaqua le pays des "Qoudâ'a" et leurs alliés. Il resta dans la région quarante jours. Cette victoire remplit de crainte les tribus qui avaient apostasie, et les personnes qui avaient cherché à semer la division entre les musulmans paniquèrent.
C'est dans ce contexte qu'Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) va lancer les musulmans dans une série de batailles contre les apostats et les imposteurs (al moutanabbi'oûn). Ces guerres furent appelées Houroûb ar-ridda.
2. Les guerres contre les apostats {ahl ar-ridda}
La religion musulmane est, tout ensemble, un engagement spirituel et temporel, que les individus doivent chercher à développer et à sauvegarder, particulièrement en respectant les obligations formulées dans le message transmis par le Prophète de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui).
Ainsi la zakât, deuxième obligation de l'Islam, a été instituée par la Loi révélée, tout comme la prière. Allah Le Très Haut a dit: "Allah anéantira l'usure et fera fructifier l'aumône. Et Allah n'aime aucun pécheur ingrat ! Quant à ceux qui croient, font œuvres bonnes, accomplissent la prière et s'acquittent de la zakât, leur salaire est auprès de leur Seigneur !" (S2/V276-277).
La zakât est un des moyens qui mènent à la sincérité, laquelle permet de s'approcher du Tout-Puissant. Par ce don volontaire, on affirme le sens de sa foi en l'unicité de Allah, et on exprime que l'amour de l'Unique (Allah), dépasse tout autre amour, y compris l'amour des biens de ce bas-monde. La zakât est une purification de l'âme contre l'avarice, égocentrique par nature. Elle est aussi une contribution généreuse pour une justice sociale. Ce sont ces sens que Allah Le Très Haut a voulu inculquer aux gens par le biais de cette obligation religieuse, et c'est ce que certaines tribus n'ont pas compris, appelant la zakàt: itâwa (tribut, impôt) !
Pour sauvegarder l'intégrité de l'Etat et l'union des musulmans, il était urgent de réagir avec fermeté face à ce danger.
Le Cheikh Dhahabî a rapporté que lorsque la nouvelle de la mort du Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) se répandit parmi les tribus, certains apostasièrent et refusèrent de verser la zakât ; alors Aboû Bakr prit la ferme décision de les combattre. 'Omar et d'autres Compagnons lui conseillèrent d'y renoncer ; il leur dit alors : "Par Allah, s'ils refusent de me remettre ne serait-ce qu'une jeune chamelle qu'ils avaient l'habitude de donner au Messager de Allah, je mènerai bataille contre eux pour qu'ils me la versent !" 'Omar lui dit :
"Comment peux-tu te battre contre ces gens, alors que le Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) a dit : "II m'a été ordonné de me battre contre les gens jusqu'à ce qu'ils reconnaissent qu'il n'y a pas d'autre Allah que Allah Lui-même, et que Mohammad est Son Messager. Celui qui en aura attesté, ses biens et sa vie seront préservés, exception faite de ceux qui manquent à leurs devoirs, auquel cas c'est à Allah qu'il revient de les juger" ! ?" Aboû Bakr lui répondit :
"Vraiment, je me battrai contre tout individu qui fera une différence entre la prière et la z.akât ; car la zakât est un devoir auquel ils ont manqué dans leurs biens !" 'Omar dit : "C'est à ce moment que Allah ouvrit mon cœur à la vraie compréhension de ce problème, tel qu'il a guidé Aboû Bakr à le comprendre, et j'ai eu dès lors la certitude que cette décision était la vérité-même !" (Rapporté par BOUKHARI et MOUSLIM)
Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) décida donc de punir les tribus qui avaient apostasie, et il sortit à la tête d'une armée, qu'il conduisit sur une distance de douze milles sur la route menant à Najd ; mais des Compagnons tels que 'Alî le supplièrent de revenir à Médine, lui rappelant que, pour la communauté, il était crucial qu'il reste sain et sauf. Alors il désigna Khâlid à la tête de l'armée, et lui ordonna de rappeler aux gens les cinq obligations de l'Islam, et de se battre contre tous ceux qui renieraient l'une d'entre elles, tout en acceptant le repentir de ceux qui reviendraient à l'Islam. Aboû Bakr donna les instructions suivantes à l'ensemble des combattants : "Je recommande aux soldats de Allah, la crainte de Allah dans toutes les circonstances, et l'obéissance à leurs émirs (commandants)."
Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) a formé douze bataillons, et a désigné à la tête de chaque bataillon un "émir", à qui il a recommandé de faire appel aux musulmans des différentes tribus près desquelles ils allaient passer, tout en leur recommandant de laisser une partie de leurs cavaliers pour protéger leur famille. Voici la liste des différents commandants (émirs), et des régions vers lesquelles ils furent dépêchés :
- Khâlid Ibn Al Walîd (Que Allah soit satisfait de lui) a été envoyé pour combattre Talha Ibn Khouwaïlid Al Asdî à Bouzakha ; après avoir mené à bien cette mission, il devait marcher sur Mâlik Ibn Nouwaïra à Al Boutah ; - 'Ikrima (Que Allah soit satisfait de lui) a été envoyé pour combattre l'imposteur Mousaïlima Al Kadhdhâb ("Le menteur") ;
- Chourahbîl Ibn Hassana a été envoyé en renfort auprès de 'Ikrima, puis devait se diriger vers Qoudâ'a ;
- Al Mouhâjir Ibn Abî Oumayya a été envoyé au Yémen pour combattre Al Asswad Al 'Ansî ;
- Houdhaïfa Ibn Mihsân a été envoyé aux gens de Dabâ à Oman ;
- 'Arfaja Ibn Harmama alla en direction de la tribu de Mouhra, et devait rejoindre ensuite l'armée de Houdhaïfa ;
- Souwaïd Ibn Mouqârrim fut envoyé à Touhâma, au Yémen ;
- Al 'Alâ' Ibn Al Hadramî fut envoyé au Bahraïn ;
- Tarifa Ibn Hâjiz, envoyé chez les Banoû Soulaïm et Hawâzin;
- 'Amr Ibn Al 'Ass fut envoyé à Qoudâ'a ;
- Khâlid Ibn Sa'îd a été envoyé aux confins du Proche-Orient (Ach-Châni).
Le message d'Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) aux apostats
Après avoir loué Allah, par les formules de reconnaissance qui Lui sont dues, et rappelé la mort de l'Envoyé de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui), il a dit :
"J'ai été informé de ce que certains d'entre vous ont rejeté l'Islam après y avoir adhéré. En vérité, ils se sont trompés vis-à-vis de Allah, ont agi avec ignorance et ont suivi le chemin du Diable. Allah
Le Très haut a dit : "Et lorsque Nous dîmes aux Anges : "Prosternez-vous devant Adam", ils s'exécutèrent tous, excepté Ibliss (Satan) qui faisait partie des djinns, et qui se révolta contre le commandement de Son Seigneur. Allez-vous cependant le prendre, ainsi que sa descendance, pour alliés en dehors de Moi, alors qu 'ils sont pour vous des ennemis ? ! Quel mauvais échange pour les injustes !" (S18/V50). Allah a dit aussi: "Le Diable est pour vous un ennemi (juré). Prenez-le donc pour ennemi ! Il ne fait qu'appeler ses partisans pour qu'ils soient des gens de la Fournaise !" (S35/V6). Je viens de vous envoyer Untel à la tête d'une armée composée des mouhâjiroûn et de ansâr, ainsi que de ceux qui les ont suivi sur le chemin de la Vérité ; et je lui ai ordonné de ne se battre contre personne, sans l'avoir appelé auparavant au chemin de Allah. Celui qui; répond à son appel, y souscrit, cesse (sa rébellion) et fait œuvre bonne, il doit l'accepter et l'aider à s'y maintenir ; quant à ceux qui s'y refusent, je lui ai donné l'ordre de leur mener bataille, de les tuer et de prendre en butin tous leurs biens.
"Celui qui le suivra, cela vaudra mieux pour lui ; quant à celui qui s'y refuse, qu'il ne se croit pas préserver du châtiment de Allah. Sachez que j'ai demandé à celui que je vous ai envoyé comme messager de vous rassembler tous en un lieu pour vous lire mon message, et de lancer l'appel à la prière (al adhân) : ceux qui y répondront en appelant à leur tour à la prière, il doit se retirer de chez eux, et accepter d'eux leur retour (à l'Islam)."
MousaiIima "al kadhdhâb" ("Le menteur")
Mousaïlima fut le plus rusé de tous les imposteurs qui ont prétendu à la prophétie. Il était de la région d'Al Yamâma. Il avait été reçu par le Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) avec la délégation des Banoû Hanîfa. A son retour auprès des siens, il avait prétendu être le partenaire du prophète Mohammad (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) dans la prophétie. Il avait appelé son peuple, qui l'avait suivi ! Et il avait envoyé au Prophète de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) le message suivant :
"De Mousaïlima le messager de Allah, à Mohammad le Messager de Allah : voilà, j'ai été désigné pour m'associer à toi, il me revient ainsi qu'aux miens la moitié de la terre, et à Qouraïch l'autre moitié. Cependant la tribu de Qouraïch sont des gens transgresseurs !"
Le Prophète Mohammad (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) lui avait répondu :
" Au Nom de Allah, Le Très Clément par essence. Le Très Miséricordieux par excellence. De Mohammad le Messager de Allah à Mousaïlima le menteur : Que la paix soit sur celui qui suit la guidance. Sache que la terre appartient à Allah, qu'il la donne en héritage à celui qu'il veut d'entre Ses serviteurs, et qu'en vérité, la bonne fin est pour les pieux."
Après la mort du Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui), l'occasion se présenta à Mousaïlima. Il forma une grande armée. Il affronta l'armée d'une prophétesse chrétienne, du nom de Sajâh. Cette femme s'était indignée de ce que les prophètes étaient toujours des hommes. Elle avait pris la décision d'attaquer Médine à la tête d'une armée puissante. En route, elle avait rencontré Mousaïlima ; ce dernier voyant en elle une sérieuse concurrente, et sachant de plus qu'il ne pourrait pas la vaincre par les armes, s'était mis à la courtiser. Sajâh était tombée dans son piège et ils s'étaient mariés. Fort de sa nouvelle armée composée de 40 000 hommes, Mousaïlima avait entamé son épopée.
Le calife Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) envoya 'Ikrima Ibn Abî Jahl pour le combattre, tout en lui recommandant d'attendre les renforts menés par Chourahbîl ; mais 'Ikrima s'était empressé d'attaquer Mousaïlima, l'attaque se soldant par la déroute totale des musulmans. Chourahbîl, qui avait appris la nouvelle en route, campa en attendant la décision du calife. Aboû Bakr envoya alors le message suivant à 'Ikrima :
"Je ne veux pas te voir rentrer à Médine, car tu risquerais d'entamer la ferveur des combattants engagés (ailleurs) !" Puis il lui ordonna de rejoindre Houdhaïfa et 'Arfaja, et de rejoindre ensuite Mouhajir Ibn Oumayya, pour mener campagne au Yémen puis à Hadramawt.
D'un autre côté, Aboû Bakr ordonna aussi à Chourahbîl d'attendre l'arrivée de Khâlid Ibn Al Walîd avec son armée. Khâlid mena la bataille contre Mousaïlima. Au début, l'armée musulmane subit un dur échec, et de nombreux Compagnons du Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) tombèrent comme martyrs dans cette bataille. Nous citons :
Sâlim, Aboû Houdaïfa, Zaïd Ibn Al Khattâb, Choujâ' Ibn Wahb', 'Abd-Allâh Ibn Sahl, Mâlik Ibn 'Amr, Toufaïl Ibn 'Amr Ad-Doussî, Yazîd Ibn Qaïss, 'Amir Ibn Al Bakîr, Aboû Doujâna Sammâq Ibn Harb, Tâbit Ibn Qaïss Ibn Chammâss, etc. Soixante-dix parmi les plus éminents houffâd (ceux qui mémorisaient tout le Coran) sont morts (Paix à leur âme).
Khâlid Ibn Walîd (Que Allah soit satisfait de lui) changea alors de tactique pour défaire Mousaïlima. Par une attaque surprise, il changea le court de la bataille. Mousaïlima s'enfuit avec quelques-uns de ses lieutenants ; ils se réfugièrent dans un jardin fortifié. Mais les musulmans réussirent à y entrer, en lançant un des leurs par-dessus la muraille, et qui réussit à leur ouvrir la porte. Mousaïlima fut tué, ainsi que ses compagnons.
II faut s'arrêter ici un moment, pour souligner que la lance qui tua Mousaïlima le menteur fut la même que celle qui avait tué Hamza, l'oncle du Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui), lors de la bataille d'Ouhoud, au mois de Chawwâl, en l'an 3 de l'Hégire. Le combattant, dans les deux cas, était Wahchî, un esclave appartenant à Hind qui, avant de se convertir à l'Islam, était, ainsi que son mari Aboû Soufyân, parmi les plus grands opposants au message de l'Islam. Pour venger la mort de son père et de son frère, tués lors de la bataille de Badr au mois de Ramadan, 19 mois après l'Hégire, Hind avait promis à Wahchî qu'elle l'affranchirait s'il tuait Hamza, et c'est ce qu'il fit.
Après la prise de la Mecque, Wahchî s'était converti à l'Islam; le Messager de Allah avait accepté sa conversion, car l'Islam efface tous les péchés commis précédemment par la personne alors qu'elle était encore dans l'incroyance ; mais le Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) lui avait simplement demandé de ne pas se présenter devant lui, car il lui rappelait trop la mort atroce de son oncle, qui avait été éventré juste après !
Wahchî participa donc, avec les musulmans, à la guerre contre l'imposteur Mousaïlima, et il réussit à le tuer de sa lance ; il remercia alors Allah de lui avoir accordé cette faveur, qui lui permettait de diminuer l'ampleur de ce qu'il ressentait comme une lourde faute.
Le Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) a dit : "Les seigneurs des martyrs sont : Hamza Ibn 'Abd-Al Mouttalib, et tout homme qui, pour avoir dit une parole de vérité en présence d'un roi injuste, a été tué !" (Rapporté par AHMAD, NASSA'I et IBN MAJJAH)
Par l'élimination de Mousaïlima et de son mouvement, les musulmans ont marqué un coup d'une grande importance sur le plan stratégique, mais aussi sur le plan psychologique, que ce soit auprès des musulmans, ou sur les différents mouvements de soulèvement !
Ils remportèrent non sans peine toutes les batailles contre le mouvement des apostats {al mourtaddîne), et cela eut une conséquence directe : le raffermissement des bases de l'Etat dont le prestige fut instauré à jamais, par l'Aide de Allah et Son Appui!
Dans ses batailles, Khâlid Ibn Al Walîd (Que Allah soit satisfait de lui), que le Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) avait surnommé "saïf Allah al masIoûF (l'épée de Allah tirée de son fourreau), a joué un rôle prédominant. Il a anéanti le mouvement de Toulaïha Al Assdî à Najd. Ce dernier avait prétendu recevoir la visite de l'ange Gabriel (Paix sur lui) à l'instar du Prophète Mohammad, et avait inventé certaines pratiques cultuelles pour marquer son indépendance vis-à-vis du message de l'Islam. Il avait été suivi par les tribus de Ghatafân, de 'Aïss, de Dhibyân, les Banoû Fazâra et les Banoû Assad. Khâlid les battit, et Toulaïha s'enfuit en Syrie; ensuite il se repentit. Khâlid (Que Allah soit satisfait de lui) se dirigea ensuite vers les Banoû 'Amir, dont le pays s'étendait de l'Est de Médine jusqu'au Golfe arabique : là, Mâlik Ibn Nouwaï-ra se refusait à envoyer la zakât ; Khâlid le tua. De là, il alla chez les Banoû Tamîm, auprès desquels était apparue Sajâh, qu'il avait battue précédemment. Elle se repentit, et retourna à l'Islam.
Puis, comme nous l'avons raconté plus haut, il élimina Mousaïlima qui s'était donné le titre de "Rahmân Al Yamâma" (Le miséricordieux d'Aï Yamâma) !
Khâlid (Que Allah soit satisfait de lui) se dirigea ensuite vers le Bahraïn, où Al Houtaïm, le chef de la tribu des Banoû Bakr, avait prétendu à la prophétie, et s'était fait appelé "Rahmân Al Yaman" (le miséricordieux du Yémen), du vivant même du Prophète Mohammad (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui).
Avertissement
II est d'une grande importance de rappeler que le rejet de l'Islam et de l'autorité musulmane ne sont pas survenus uniquement après la mort du Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui). Le message de Allah a traversé un désert de rejet, de persécutions, et sa route a été parsemée de sacrifices énormes. Lorsque les fidèles de l'Islam se sont multipliés, nombreux sont les gens qui suivirent le courant, sans grande conviction. Ils n'ont pas saisi la transcendance que l'Islam cherche à réaliser dans le cœur du croyant, à travers la foi en Allah. Ainsi du vivant du Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui), et ce à partir de la fin de la dixième année de l'hégire, des imposteurs sont apparus et se sont proclamés prophètes, à l'exemple de Mousaïlima, Al Asswad Al 'Ansî, 'Alqama Ibn 'Altha, Oumm Rafl Salama fille de Mâlik et d'autres.
Il est vrai que le Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) avait réussi, à unifier les tribus arabes pour en faire une communauté de foi. Le Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) avait su étendre son autorité sur une bonne partie de l'Arabie du centre, qui englobait la Mecque, Médine et les régions avoisinantes, c'est pourquoi certains l'avaient nommé "l'émir du Hijaz". Il avait démantelé l'esprit de parti, mais certaines personnes ont voulu réanimer cet esprit. Dès l'annonce de la mort du Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui), ils ont réussi à attirer à eux toutes les personnes qui n'avaient pas saisi la portée de l'Islam ni le sens de ses prescriptions, ainsi que les hypocrites et les chefs déchus de leurs avantages.
Il faut aussi rappeler que certaines tribus ne s'étaient pas converties à l'Islam, mais elles avaient simplement signé des traités avec le Messager de Allah, traités dont l'échéance coïncidait avec le décès du Prophète de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui). Elles ont profité de cette échéance pour se rebeller contre la nouvelle autorité centrale.
Donc, Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) a bien compris le danger de ces mouvements sur la stabilité de l'Etat, et sur la mission qui incombait aux musulmans : la propagation du message de Allah sur la terre. Allah Le Très Haut a dit : "Légèrement ou lourdement équipés, élancez-vous toujours vers le combat ! Mettez, vos biens et votre vie au service de Allah ! Cela vaudra mieux pour vous ; n'en doutez, pas !" (S9/V41).
Cette fermeté d'Aboû Bakr était justifiée, et elle démontre la sagesse de l'homme et la portée de ses résolutions.
Les batailles contre le mouvement des apostats n'étaient pas des batailles contre des personnes qui auraient voulu rejeter la foi à laquelle ils avaient adhéré ; c'étaient plutôt des guerres politico-religieuses.
La politique du calife Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) face à ce grave problème, comportait deux phases :
- La première étape fut de rappeler aux meneurs de ces mouvements la gravité de leur démarche : il les appelait à se repentir et à cesser de se révolter et de porter atteinte à l'Islam en engendrant, par leurs impostures, un désordre dans la communauté ;
La deuxième phase consista en l'envoi de bataillons dans toutes les régions où il y avait un foyer de division (fitnd).
Les conséquences des guerres d'apostasie
II est évident que ces guerres d'apostasie {houroûb ar-ridda), dont les instigateurs furent les imposteurs et les tribus arabes assoiffées de grandeur, furent déclenchées avec l'aide et sous la direction des deux super-puissances de l'époque : Byzance et la Perse, qui s'étaient vues refoulées de l'Arabie, et dont les intérêts économiques et stratégiques avaient été fortement ébranlés. Il en allait de même pour les tribus juives et les hypocrites de Médine, qui avaient perdu tous leurs avantages, surtout après qu'ils aient fait alliance avec les mécréants, et que Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) eût décidé de les chasser définitivement de ce qui devait devenir le deuxième lieu saint de l'Islam : Médine.
Ainsi les victoires remportées par les musulmans seront riches de conséquences positives pour la communauté musulmane :
- Ces guerres, en premier lieu, seront une occasion précieuse, pour enraciner l'esprit de solidarité entre les musulmans, ainsi que le sens de l'organisation, de la responsabilité et le respect de l'ordre.
- Les musulmans vont acquérir une expérience militaire, grâce aux combats qu'ils ont dû mener sur différents fronts en même temps.
Ces guerres étaient le moyen idéal pour faire disparaître une fois pour toute l'esprit tribal et de parti ; elles ont définitivement reliée toute l'Arabie au centre de l'autorité morale et politique de l'Etat islamique, car la relation de ces régions avec l'Etat était limitée, au début, au versement de la zakât. Là, c'est l'union politique qui se réalise.
Cette nouvelle situation va permettre l'instauration de nouveaux rapports qui auront pour effet direct l'enracinement de la foi dans les cœurs de ces gens sur de nouvelles bases.
Ces guerres seront l'annonce du début d'un mouvement qui sera dirigé pour la propagation du message de Allah, vers la Perse, l'Irak et le Proche-Orient (Ach-Châm). Et le plus extraordinaire, c'est que les Arabes qui furent derrière les mouvements d'apostasie participeront d'une manière active à ces foutoûhât, et feront preuve d'un sacrifice unique dans l'histoire universelle de leur vie et biens, pour servir le Message de Allah (Gloire à Lui).
3. Al foutoûhât sous la direction d'Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui)
Nous utiliserons le terme foutoûhât (ouvertures), pour définir l'action que menèrent les musulmans pour propager le message de l'Islam. Le terme de "conquêtes", utilisé dans les livres écrits en langue française donne une fausse image de cette action, et le lecteur garde dans l'esprit l'idée d'une colonisation et d'un envahissement ! Il s'agit en fait d'une mission sacrée dont chaque musulman a la charge : la transmission de la religion de Allah. Allah Le Très Haut a dit : "...Et appelle à ton Seigneur. Tu es certes sur une voie droite. " (S22/V67).
Allah Le Très Haut a dit aussi : "La vraie religion, pour Allah, c'est l'Islam." (S3/V19).
* * *
Quand l'Islam est apparu, la direction politique et économique du monde était entre les mains des Perses et des Byzantins, qui ne cessaient de s'affronter par alliés interposés : les Arabes! Vu leur situation géopolitique, chacune de ces deux puissances visait au maintien de ses intérêts dans la région. Byzance, dont la capitale était Constantinople, avait des visées sur les côtes orientales de la Méditerranée ; quant à la Perse, ses intérêts directs se situaient sur les côtes du golfe persique et les zones du golfe arabique. Dans ce contexte, les Arabes étaient divisés, et souvent en guerre les uns contre les autres.
Quand le message de l'Islam est né, il unit les cœurs de ces frères ennemis. Il en fit une unique communauté œuvrant pour le Bien. Leur but était devenu le même : la transmission de la Parole de Allah au monde. Cet acte est considéré comme le summum du sacrifice par lequel le croyant manifeste sa foi et son amour envers son prochain, pour le sortir des ténèbres de l'incroyance vers la lumière de la guidance et de la foi. Allah Le Très Haut a dit : "Allah est le Protecteur des croyants : II les fait sortir des ténèbres vers la lumière. Les incrédules ont pour patrons les "Tâghoût"' : ceux-ci les font sortir de la lumière vers les ténèbres : ils seront les hôtes de l'Enfer où ils demeureront immortels." (S2/V257).
La sîra (la conduite) du Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) en matière de prédication du message de l'Islam, envoyant des délégations et des messagers aux rois des pays avoisinants, servit de ligne de conduite à Aboû Bakr dans ses décisions en la matière. En effet, l'Islam s'adresse à toute l'humanité ; Allah Le Très Haut a dit : "Nous t'avons envoyé à la totalité des Hommes, uniquement comme annonciateur de la bonne nouvelle et comme avertisseur ; mais la plupart
1 "Tâghoût" : terme arabe désignant toute forme de fausse divinité.
des Hommes ne savent pas. " (S34/V28). Allah a dit aussi : "Nous t'avons seulement envoyé comme une miséricorde pour les mondes." (S21/V107).
Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) a compris l'enjeu politique et vital pour l'Islam, qui résidait derrière ses choix. Aboû Bakr a dit à ce sujet : "Chaque fois qu'un peuple délaisse le jihâd (l'effort pour établir la religion de Allah), Allah l'éprouvera par l'humiliation !"
Allah Le Très Haut a dit : "Nous avons fait de vous une communauté éloignée des extrêmes pour que vous soyez, les témoins de ce que font les Hommes, et que le Prophète soit témoin de ce que vous faites." (S2/V143).
A partir de ces données religieuses, l'universalisme du message de l'Islam est évident : il appelle à faire parvenir la Parole de Allah à l'humanité toute entière.
Parce qu'il a compris ce que cela impliquait quant à la situation politique de la région, le calife Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) a déclenché le mouvement des foutoûhât, pour sauver les déshérités de la tyrannie des injustes et les ramener vers la justice de l'Islam, et en même temps pour préserver la communauté musulmane des dangers que représentaient ces deux puissances.
Cette action de transmission de l'Islam aux déshérités et aux égarés de la terre, ne pouvait se réaliser qu'en s'attaquant aux deux puissances de l'époque : Byzance et la Perse, qui représentaient le danger majeur pour l'existence même de l'Islam, et dans ce cas il valait mieux attaquer le premier, au risque de voir son entité mise à l'épreuve, à l'exemple de ce qui s'était passé avec les mouvements des imposteurs. Le calife Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) confia cette charge à l'armée musulmane, qui était spécialement sous le commandement du Compagnon du Prophète Khâlid Ibn Al Walîd (Que Allah soit satisfait de lui).
Fath Al 'Iraq : l'ouverture de l'Irak
Après que Khâlid et ses compagnons eussent réussi à éliminer tous les foyers de rébellion, et à mettre fin aux mouvements d'apostasie en Arabie (Bahraïn, Yémen...), Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui), informé de la situation politique dégradée de l'empire perse, donna l'ordre à Khâlid Ibn Al Walîd de se diriger à la tête de l'armée vers l'Irak, où il fut rejoint par Al Mouthannâ Ibn Hâritha Ach-Chaïbâni et Mad'oûn Ibn 'Adiy Al 'Ijli, et ce en l'an 12 de l'Hégire (633 apr. J. C.).
L'empire perse était affaibli, comme l'a décrit TABARI dans son Tarîkh : "Le gouvernement de l'empire de Perse était tombé entre les mains de femmes et d'enfants..."
Sur ordre du calife Aboû Bakr, Khâlid Ibn Al Walîd quitta Al Yamâma, et se dirigea vers Al Madâ'in. Successivement Hîra fut prise, ainsi qu'Obolla qui était une place frontière de la Perse du côté de l'Arabie. Cette place était commandée par le général Hourmouz, qui avait sous son commandement vingt-mille hommes. Lors d'un combat singulier Khâlid tua Hourmouz, ce qui mit l'armée perse en déroute. Cette bataille fut appelée la bataille des chaînes (dhat as-salâssil), car les Perses avaient apporté avec eux des chaînes avec lesquelles ils projetaient d'enchaîner tous les musulmans qui seront faits prisonniers ! Mais, selon une autre version, Hourmouz avait enchaîné ses soldats les uns aux autres pour qu'ils ne fuient pas la bataille !
L'avancée de l'armée musulmane continua, et les victoires se succédèrent : Madsar, Waladja. Khâlid (Que Allah soit satisfait de lui) s'empara de l'Irak, des villes de Bassora, de Hîra, et de Sawad. Ensuite ce fut la prise d'Aï Anbar. Une fois sa mission accomplie de ce côté de l'Empire perse, Khâlid se retourna vers 'Aïn Tamr, une forte garnison perse ; à cette époque, le roi de Perse venait de mourir, et on avait élevé sur le trône une femme. La situation de l'armée perse était catastrophique, et cela n'était que favorable à l'avancée de l'armée musulmane. A chaque nouvelle victoire, Khâlid envoyait ses émissaires et ses agents dans toutes les contrées pour appliquer la Loi de Allah et faire régner la justice entre les habitants.
Fath Ach-Châm : l'ouverture du Proche-Orient
Après que Khâlid en eût terminé avec le front perse, le calife Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) lui ordonna de se diriger vers Ach-Châm, où les musulmans se préparaient à affronter les Byzantins dans la fameuse bataille d'Aï Yarmoûk, au mois de Rabî' II l'an 13 de l'hégire.
Les historiens ont rapporté que le nombre d'hommes engagés dans cette bataille du côté byzantin était de 100 000 hommes selon Ibn Al Athîr, ou de 240 000 hommes selon Tabarî. Quant aux musulmans, ils étaient entre 40 000 hommes et 46 000 hommes.
Quand Khâlid arriva à Al Yarmoûk, il trouva que l'armée musulmane était divisée en quatre, avec à la tête de chaque partie un commandement ! Il réunit les quatre commandants, qui étaient Aboû 'Oubaïda, Yazîd Ibn Abî Soufyân, Chourahbîl Ibn Hassana et 'Amr Ibn Al 'Ass, et leur dit : "La situation dans laquelle se trouve l'armée musulmane est plus grave encore que cette grande armée qui les entoure ; et c'est une situation, qui, en vérité, profite plus à son ennemi ! Je sais que c'est la recherche du prestige qui vous divise ! Par Allah, mettons-nous d'accord à ce que chacun d'entre nous dirige l'ensemble de l'armée, à tour de rôle, pour une journée ! Et accordez-moi le commandement unifié pour la première journée." Les autres chefs acceptèrent la suggestion de Khâlid, et Allah a accordé la victoire aux musulmans en ce jour-même !
Alors que la bataille allait commencer, un courrier arriva qui annonçait la mort du calife Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui), et le fait que 'Omar Ibn Al Khattâb (Que Allah soit satisfait de lui) avait été désigné à la tête de la communauté musulmane. 'Omar ordonnait par le même courrier la destitution de Khâlid, et la nomination de 'Oubaïda Ibn Al Jarrâh, au commandement général de l'armée musulmane. Khâlid ordonna que l'on garde sous scellé le courrier et qu'on n'en divulgue pas le contenu, de peur que cela n'affecte l'enthousiasme des musulmans qui risqueraient d'être mis en déroute, surtout que les deux armées étaient en face l'une de l'autre !
Tabarî dans son Tarîkh a rapporté ceci : "...Or on annonça à Khâlid qu'Aboû Bakr était gravement malade, à Médine. Les musulmans furent découragés par cette nouvelle. Khâlid leur adressa ce fameux discours dans lequel il leur dit : "Jamais, depuis l'existence de l'Islam, il n'y eut un jour (décisif) comme celui d'aujourd'hui. Jamais une armée d'infidèles aussi nombreuse ne s'est trouvée en présence des musulmans. Ne vous abandonnez pas au découragement à cause de la maladie d'Aboû Bakr. Combattez dans le sentier de Allah et luttez pour la religion de Allah !"
"La bataille se termina en faveur des musulmans et les Byzantins subirent une défaite cuisante. On a estimé les pertes byzantines à 100 000 morts.
"Une fois la bataille finie, Khâlid entra chez Aboû 'Oubaïda Ibn Al Jarrâh, et lui remit le commandement général de l'armée musulmane selon les ordres du nouveau calife 'Omar Ibn Al Khattâb (Que Allah soit satisfait de lui).
"Nous aimerions rapporter ce que le calife 'Omar Ibn Al Khattâb (Que Allah soit satisfait de lui) a dit à Khâlid pour justifier le fait de l'avoir démis de ses fonctions : "Je ne t'ai pas destitué de tes fonctions parce que j'avais quelque doute sur ton honnêteté, mais parce que j'ai constaté que les musulmans commençaient à trop s'attacher à ta personne, alors j'ai voulu te protéger des dangers que pouvait te causer leur fascination."
Les causes des victoires musulmanes
L'Islam incite ses fidèles à s'efforcer d'appliquer de plus en plus sincèrement les prescriptions divines, et à les transmettre aux autres, même au prix de leur vie. Cette religion est fondée sur l'adoration de l'Unique (Allah), gloire à Lui, et cette adoration implique un amour sans limite, et une lutte contre tout ce qui attire l'homme pour l'éloigner du bien et qui l'écarté du chemin de Allah.
Allah a chargé les fidèles de transmettre Sa Parole et Ses commandements aux Hommes. Allah Le Très Haut a dit à ce sujet : "Ceux qui transmettaient les messages de Allah et qui Le craignaient, et ne redoutaient personne en dehors de Lui..." (S33/V39). Cette transmission est désignée par l'expression "jihâd fî sabîli-llâh" (l'effort sur le chemin de Allah), et par conséquent le recours à la guerre n'est pas exclu si quelqu'un tente d'empêcher les musulmans d'accomplir cette mission divine.
Ce sacrifice délibéré que le croyant fait de sa vie pour transmettre la Parole de Allah à l'humanité, est la cause première qui explique les victoires musulmanes successives lors des batailles qu'ils ont menées contre les Perses et les Byzantins. C'étaient des hommes qui avaient réussi à se débarrasser de tout égoïsme, et s'étaient portés volontairement au service de Allah.
En vérité, seuls les gens qui ont atteint un niveau de purification et de sincérité sans équivoque, sont capables de faire un don pareil. Allah nous les a décrit dans Son Livre : "II y a parmi les croyants des hommes qui ont été fidèles au pacte qu'ils avaient conclu avec Allah. Certains d'entre eux ont atteint le terme de leur vie, certains autre attendent ; ils n 'ont point failli à leur engagement, et leur attitude ne change pas... " (S33/V23).
Si les musulmans furent victorieux, ce fut pour les raisons suivantes :
- Ils ne cherchaient pas à nuire à l'humanité, leurs batailles n'étaient pas des batailles de conquête, en vue d'asservir les peuples et les priver de leurs droits les plus élémentaires ! Ces batailles musulmanes étaient des batailles qui n'engendraient ni destruction ni désordre. Et nous avons noté qu'à chaque fois qu'une région était ouverte, Khâlid Ibn Al Walîd nommait un émir et lui donnait la charge d'organiser la vie du groupe en toute équité.
- Les armées musulmanes ont fait preuve d'un sacrifice unique. Ils recherchaient la mort alors que leurs opposants s'attachaient plus à la vie. Le martyr était béni, et admis dans les jardins d'Eden. Allah Le Très Haut a dit : "Ne dites pas de ceux qui ont été tués dans le chemin de Allah qu 'ils sont morts ! Non !... Ils sont vivants, mais vous n 'en avez. pas conscience. " (S2/V154).
- Le respect des ordres et l'obéissance aux chefs, ainsi que la confiance qui régnait entre les "émirs" et les soldats étaient les garants de la victoire. Surtout, il faut noter que l'armée musulmane était une armée de volontaires, y compris les commandants : ils se considéraient tous comme des frères dans la foi, et tous participaient au jihâd uniquement pour plaire à Allah ; et faisant don de leur vie pour que la lumière de l'Islam sauve les hommes et les sorte des ténèbres de l'égarement.
- Les musulmans ont fait preuve d'une connaissance de stratégie militaire éblouissante, surtout grâce à Khâlid Ibn Al Walîd (Que Allah soit satisfait de lui).
- La situation politique en Perse et à l'intérieur de Byzance a fait que l'armée musulmane s'est trouvée à maintes reprises devant des forces désorganisées, qui se battaient sans beaucoup de conviction.
- Les musulmans furent accueillis en libérateurs par des peuples souffrant d'injustice et d'exploitation humaine. Les musulmans étaient les messagers de l'espoir et de nouvelles valeurs. Ils refusaient toute forme d'exploitation, que ce soit au nom d'un lignage, d'une classe sociale ou d'un poste religieux.Tous ces facteurs furent des éléments essentiels et décisifs dans les victoires musulmanes. De plus, la recherche de la satisfaction de Allah, qui motivait les musulmans, leur a permis de conquérir le cœur de ceux à qui ils s'adressaient, grâce à la sincérité dans leur démarche. L'amour de Allah et de leur prochain les motivaient, et non pas la recherche du butin comme l'ont prétendu certains détracteurs ! Ainsi nous lisons dans le livre de Raymond CHARLES, Le droit musulman',( Série Que sais-je ?, n° 702, pp. 10-11.) se référant à J. SCHUMPETER :
"...Le génie de l'Envoyé de Allah fut d'avoir su modifier son langage ; désormais ce dernier s'adressera à l'instinct de pillards mieux doués pour entendre les appels à la guerre sainte que pour suivre les prêches sur le Jugement dernier : "Le facteur de la conversion intime fut rabaissé au rôle d'une discipline personnelle du guerrier. Cette organisation convenait au Bédouin comme l'eau au poisson."
Comment peut-on accepter de tels propos alors que le message de l'Islam n'a pas cessé de se propager depuis 14 siècles, grâce à la sincérité et aux sacrifices dont ont fait preuve ceux que l'on a appelés "Bédouins" !!!
Ces Hommes se sont mis au service de Allah, et ont fait abstraction des passions passagères ; en vérité, un effort pareil implique une rupture avec les attaches de ce bas-monde. Allah Le Très Haut a dit à leur propos : "Certes les vrais croyants sont ceux qui croient en Allah et en Son Prophète, sans plus jamais être sujets au doute ; qui y vont de leurs biens et de leurs personnes au service de Allah. Tels sont les croyants authentiques." (S49/V 15).
4. La direction de l'Etat au temps d'Aboû Bakr
Avant d'être investi comme calife, Aboû Bakr était un commerçant. Au début de son califat, il continua à habiter dans la banlieue de Médine avec sa femme Habîba ; mais après six mois, il vint s'installer à Médine même pour mieux gérer les affaires de l'Etat. Cependant il continuait à vendre et à acheter des étoffes pour subvenir aux besoins de sa famille ; en plus, il s'occupait de son troupeau de moutons, qu'il faisait paître lui-même de temps en temps, et il trayait les brebis pour des gens !
Avec les événements qui surgirent, Aboû Bakr comprit la nécessité de se libérer complètement pour se consacrer entièrement aux affaires de l'Etat. Il dit un jour : "Non, par Allah ! on ne peut s'occuper du bien-être des musulmans tout en s'adonnant au commerce !"
Alors les musulmans lui fixèrent un salaire annuel, qu'Ibn Sa'd, dans ses Tabaqât a évalué à une somme qui variait entre 2 500 et 6 000 dirham par an ; mais, avant de mourir, Aboû Bakr ordonna à sa famille de rembourser cette somme en vendant pour cela son verger !
Les réalisations d’ Aboû Bakr
D'après Souyoûtî, Aboû Bakr fut le premier à avoir mis sur pied le trésor de l'Etat (baït al mal). Cette trésorerie était située au début dans la localité de "As-Sounah", et ce lieu n'était pas gardé. Le calife avait fait installer une serrure dont il avait les clés, et il dépensait pour les musulmans jusqu'à ce qu'il n'en reste rien. Puis, lorsque le calife vint s'installer à Médine, il le fit transférer, et il se chargeait lui-même de la distribution des dons aux musulmans.
Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) fut le premier à avoir mis sur pied le registre de donations : il donnait de la même manière à l'esclave et à la personne de statut libre, la même valeur à l'homme et à la femme, aux grands et aux petits. En plus ils investissaient une partie des revenus du Trésor dans l'approvisionnement des armées musulmanes en chevaux, chameaux et provisions.
Après la mort d'Aboû Bakr, le nouveau calife 'Omar Ibn Al Khattâb (Que Allah soit satisfait de lui) convoqua les plus éminents Compagnons, parmi lesquels il y avait 'Abd-Arrahmâne Ibn 'Awf et 'Othmân Ibn 'Affân : ils ouvrirent le trésor et ils n'y trouvèrent rien ! Car Aboû Bakr dépensait tout pour le bien-être des musulmans.
On a demandé à un homme, chargé de peser la monnaie pour le calife, à combien il évaluait la valeur des biens qui avaient transité par baït al mal, et il répondit : "Environ 200 000 dirhams".
Les gouverneurs
Quand Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) accéda aux fonctions de calife, les musulmans n'avaient d'autres territoires que la péninsule arabique. Le calife l'avait divisé en régions (wilâyat), et il chargea des gouverneurs ou émirs pour veiller à leur bon fonctionnement. Chaque émir avait la responsabilité de diriger les prières, d'appliquer les sanctions et de faire justice, car Aboû Bakr n'avait pas nommé de juges.
Voici la liste des différentes régions musulmanes lors de la désignation d'Aboû Bakr, ainsi que le nom de leur émir respectif:
1. La Mecque : son émir était 'Itab Ibn Oussaïd : il avait été désigné par le Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui), et Aboû Bakr le maintint dans ses fonctions.
2. Tâ'if : son émir était 'Othmân Ibn Abî Al 'Ass, le Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) l'avait désigné, et Aboû Bakr le reconfirma dans sa fonction.
3. San'â' (Yémen) : son émir était Al Mouhajir Ibn Abî Oumayya, c'est lui qui l'avait ouvert, et il a été confirmé pour la diriger après la fin des guerres d'apostasie.
4. Hadramawt : son gouverneur était Ziyâd Ibn Labîd.
5. Khawlan : son gouverneur était Ya'la Ibn Oumayya.
6. Zoubaïd et Rimi" : leur gouverneur était Aboû Moussa Al Ach'arî.
7. Al Janad : son émir était Mou'âdh Ibn Jabal.
8. Najrân : son émir était Jarîr Ibn 'Abd-Allâh.
9. Jarach : son gouverneur était 'Abd-Allâh Ibn Thawr.
10. Bahraïn : son émir était Al 'Alâ' Al Hadramî.
11. En ce qui concerne l'Irak et le Proche-Orient, qui avaient été ouverts plus tard, il revenait à l'émir de l'armée de nommer des responsables sur les lieux, parce qu'il fallait passer par une période de transition avant qu'un gouverneur civil ne s'installe, tant qu'il restait un risque d'attaque de la part des anciennes familles régnantes et de leurs alliés.
Les gouverneurs touchaient leur salaire de baït al mal (le Trésor de l'Etat). Rappelons que ces gouverneurs étaient en grande majorité des Compagnons du Messager de Allah ; c'étaient des gens honnêtes, qui avaient été loués par Allah pour leur sincérité et leur intégrité.
L’organisation de l'administration
Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) avait des secrétaires qui inscrivaient ses ordres et directives : ils étaient parmi les plus illustres Compagnons du Prophète (Que Allah soit satisfait d'eux). Nous ne citerons que 'Alî Ibn Abî Tâlib, 'Othmân Ibn 'Affân et Zaïd Ibn Thâbit.
Pour ses cachets, le calife avait une bague sur laquelle était inscrit: "ni'ma al qâdirou-llâhou' ("Allah est certes Le plus Capable !").
Quand il devait prendre de graves décisions concernant le fonctionnement de l'Etat, ou lorsqu'il devait rendre justice ou décréter une loi, le calife Aboû Bakr a toujours eu recours à la consultation {choûrâ) des Compagnons du Prophète, et plus spécialement 'Alî, 'Omar, 'Othmân, Sa'd Ibn Abî Waqqass, et Sa'îd Ibn Zaïd.
L'armée musulmane et son fonctionnement
A l'époque d'Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui), les soldats musulmans étaient tous des volontaires qui participaient aux différentes expéditions mus par leur foi, et qui n'avaient d'autre désir que le martyr pour la cause de Allah. Ils dépensaient de leur argent pour s'approvisionner. Allah les a loué dans Le Saint Coran : "Les vrais croyants sont seulement ceux qui croient en Allah et en Son Messager, qui par la suite ne doutent point et qui luttent avec leurs biens et leur personne dans le chemin de Allah. Ceux-là sont les véridiques !" (S49/V15).
Après les victoires, l'émir distribuait les 4/5 du butin entre les combattants, et le 1/5 restant revenait de droit à bait al mal, par l'intermédiaire duquel on le distribuait aux nécessiteux parmi les musulmans, ainsi que dans tout ce qui allait dans le sens de l'intérêt de la communauté.
Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) n'a jamais contraint les musulmans à s'engager dans les batailles, même lors des batailles contre les apostats ; il a ordonné ceci à ses commandants : "Libérez de son engagement toute personne ne désirant pas participer à l'ouverture (fath) de l'Irak et du Châm ! N'enrôlez pas de force ceux qui ne le désirent pas ! Faites appel aux musulmans qui ont participé à l'élimination des mouvements d'hérésie {ar-riddda), ainsi qu'à ceux qui sont restés fermes dans leur foi après la mort du Prophète de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui).
L’ASSEMBLAGE DU CORAN PAR ABOU BAKR
En Introduction
La religion musulmane est fondée sur le Message transmis par Allah l'Unique au Prophète Mohammad (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) ; elle stipule que Allah (Qu'il soit glorifié) a décidé, dans Sa Science aussi ancienne que Lui, que le Message transmis au dernier des prophètes resterait valide jusqu'à la fin des temps et dans le monde entier. La conservation de ce message, le Saint Coran, n'a pas été confiée aux seuls humains, mais nous savons d'ores et déjà que Allah s'en est chargé, et que Sa Volonté va s'accomplir par l'intermédiaire des Hommes ! Allah Le Très Haut a dit : "C'est Nous Qui t'avons révélé "le Rappel édifiant", et Nous veillerons, certes, à son intégrité." (S15/V9).
Cette Volonté divine va s'accomplir à travers les ordres et directives de Allah (Gloire à Lui), et de Son Messager, qui seront transmis aux fidèles, à propos de la relation qu'ils doivent entretenir avec le Livre révélé.
La préservation du texte révélé s'est accomplie grâce à deux moyens : l'écriture et la mémoire. Dans le Saint Coran, Allah, Le Miséricordieux, fait l'éloge de l'écriture et de la lecture. Il dit :
"Lis, au Nom de ton Seigneur Qui a créé,
II a créé l'Homme d'un caillot accroché !
Lis, car ton Seigneur est Le plus Généreux,
Qui a enseigné au moyen de la plume..." (S96/V1-5).
Le Prophète Mohammad (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) a ainsi compris l'importance de l'écriture ; mais celle-ci n'était connue que de quelques-uns de ses concitoyens. Le Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) chargea donc ceux de ses Compagnons qui savaient lire et écrire, de prendre note des versets transmis. C'était une chose importante, mais il était également important que la majorité des musulmans apprennent à lire et à écrire : or, il se fait qu'au moment de la bataille de Badr, certains Arabes mecquois furent faits prisonniers par les musulmans, et parmi eux se trouvaient des hommes lettrés. Le Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) leur offrit la possibilité d'être libérés, lorsqu'ils auraient appris à lire et à écrire à un certain nombre de musulmans.
Le Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) recevait la révélation par fragments ; il ne lui était révélé que quelques versets à la fois, qu'il transmettait alors aux musulmans. En plus, il a chargé officiellement des Compagnons de prendre note de tous les versets révélés : ce sont ceux qu'on appelle les écrivains de la révélation (kouttâb al wahy). Chaque fois que le Prophète de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) transmettait les versets nouvellement révélés, il précisait aux écrivains à quel endroit du texte ils devaient prendre place, par rapport aux versets déjà connus. Cette organisation du texte ne venait pas de lui, mais d'une prescription divine.
Les écrivains de la révélation étaient Zaïd Ibn Thâbit, assisté de 'Abd-Allâh Ibn Mass'oûd, 'Abd-Allah Ibn Az-Zoubaïr, Oubaï Ibn Ka'b, 'Alî Ibn Abî Tâlib, Thâbit Ibn Qaïss, etc.
Cette conservation du texte voulue par Allah le Tout-Puissant allait s'accomplir à travers d'autres comportements des musulmans : les pratiques cultuelles.
Afin d'apprendre à mieux utiliser les sources de leur foi, les musulmans apprirent le Coran par cœur. Les mérites de ceux qui ont étudié tout le Coran par cœur ont été vantés par Allah (dans plusieurs passages du Coran), et par le Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) qui a dit : "Le meilleur d'entre vous, c'est celui qui apprend le Coran et le fait apprendre aux autres."
De même, la prière est le lien entre le croyant et son Créateur;
or, dans la prière, il faut réciter des passages du Coran : donc, tous les musulmans doivent apprendre au moins une partie de la Parole de Allah. Ainsi, de génération en génération, la communauté musulmane a préservé le Saint Coran. Le rôle de la première génération fut de la plus haute importance dans cette démarche.
La conservation par écrit du texte coranique par Aboû Bakr
Après la mort du Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui), on disposait d'une copie complète du Coran. Cet exemplaire était inscrit sur des sortes de fiches, faites d'omoplates de chameaux, de feuilles sèches de palmiers, de pierres taillées, ou encore de parchemins.
Notons par la même occasion que le calife Aboû Bakr faisait partie des Compagnons réputés pour leur connaissance du Coran:
la preuve en est que le Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) l'avait désigné pour diriger les musulmans dans la prière. Le Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) a dit : "C'est celui qui connaît le mieux le Livre de Allah, qui guide les gens (dans la prière) ! " (IBN KATHIR)
Donc le calife Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) prit la décision d'assembler la Parole de Allah. Cette décision fit suite aux guerres que les musulmans menèrent contre les imposteurs et leurs alliés : Zaïd Ibn Thâbit (Que Allah soit satisfait de lui) a raconté qu'Aboû Bakr le convoqua, après avoir mis fin à la révolte d'Al Yamâma. Quand je me suis présenté, a-t-il dit, j'y ai trouvé 'Omar Ibn Al Khattâb (Que Allah soit satisfait de lui). Aboû Bakr me dit : "II y a eu beaucoup de tués parmi les qourra le jour d'Al Yamâma, et je crains que cela n'arrive dans d'autres lieux où les musulmans se battent : parmi eux, il y a des Compagnons qui mémorisent la totalité du Coran (al qourra'), et on risque de voir une partie du Coran se perdre s'ils disparaissent ; je considère qu'il serait mieux d'assembler le Coran, et de le réécrire. A 'Omar, qui m'a suggéré cette initiative, j'ai demandé comment je pourrais faire quelque chose que le Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) n'a pas faite, et 'Omar m'a répondu : "Par Allah, je jure qu'il vaut mieux l'assembler !", et il n'a eu de cesse de chercher à me convaincre, jusqu'à ce que Allah m'eut amené à comprendre la nécessité d'un tel acte, et à en devenir convaincu. Je me suis donc rallié à l'avis de 'Omar !"
Zaïd continua de raconter : '"Omar était assis et ne disait toujours rien ! Et Aboû Bakr continua : "Tu es un homme jeune et plein de sagesse, et nous avons confiance en toi, car tu as fait partie de ceux qui écrivaient la Révélation au temps du Prophète de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui). (C'est pour cela que je te charge) de rassembler le Coran, et de rechercher ceux qui en ont connaissance." Zaïd dit : "Par Allah! Ce qu'il me chargeait d'accomplir était plus lourd pour moi, que s'il m'avait demandé de déplacer les montagnes ! Alors j'ai demandé à Aboû Bakr et à 'Omar : "Comment vous permettez-vous de faire quelque chose que le Messager de Allah n'a pas accompli ? !" Alors Aboû Bakr me répondit : "Je jure au Nom de Allah, que cela est meilleur !" Zaïd dit : "Je n'ai pas cessé de refuser cette offre, ainsi que l'initiative ; quant à eux, ils continuèrent à me convaincre, jusqu'à ce que Allah m'eût guidé pour comprendre la nécessité d'une telle initiative ! Alors j'ai commencé à assembler les textes qui étaient rédigés par fragments sur divers matériaux, et je me suis adressé aux différents qourrâ' parmi les Compagnons, jusqu'à ce que je trouve les deux versets qui me manquaient de la Sourate at-tawba (le Repentir, Sourate 9), auprès de Khouzaïma Ibn Thâbit. Puis j'ai transmis les feuillets entiers à Aboû Bakr, chez qui ils ont été conservés jusqu'à sa mort. Ils furent ensuite conservés chez Hafsa, la fille de 'Omar Ibn Al Khattâb et épouse du Prophète de Allah (Que Allah soit satisfait d'elle)". (Rapporté par BOUKHARI)
Aboû Bakr fut le premier à appeler la copie du Coran :
moushaf. (Cité par SOUYOUTI)
Quelques informations se rapportant aux commentaires du Coran faits par Aboû Bakr
On rapporté que l'on a interrogé Aboû Bakr au sujet de la Parole de Allah : "Ils te demandent ce qui a été décrété au sujet d'al kalala"..." (S4/V176), il répondit : "Je vais vous dire mon opinion à ce sujet. Si cela est juste, ce n'est que par la grâce de Allah que j'y suis parvenu, et si je me trompe, cela vient du Diable ! Je pense qu'il s'agit du cas (en matière de partage de l'héritage), où le parent et l'enfant sont morts, et où la question est de savoir à qui l'héritage revient de droit."
Lorsque 'Omar a été investi, il a gardé cette explication comme base juridique à ce sujet, en disant : "Je serais gêné de changer un jugement établi par Aboû Bakr. (Rapporté par AL BAIHAQI)
Amir Ibn Sa'd Al Bajii a rapporté qu'Aboû Bakr a dit, au sujet de la Parole de Allah : "A ceux qui agissent en bien est réservée la meilleure (récompense) et même davantage..." (S10/V26), que cette meilleure récompense et même davantage, "c'est le fait de voir la Face de Allah (Qu'il soit loué)". (Rapporté par IBN JARIR)
On rapporté qu'Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) a dit, concernant la Parole de Allah "Ceux qui disent : "Notre Seigneur est Allah" et qui ensuite se tiennent sur le droit chemin..." (S46/V13), qu'il s'agit de personnes qui l'ont dit et qui s'y sont maintenus jusqu'à la mort : ceux-là font partie de ceux qui étaient droit et justes ! " (Rapporté par IBN JARIR)
ABOU BAKR ET LES HADITH QU'IL A TRANSMIS
L'imâm An-Nawawî a rapporté dans son livre Tahdhîb, que le calife Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) n'a transmis que 42 hadîth, et il explique que la raison n'en est pas une incompétence quelconque ou un manque de savoir, surtout lorsque nous savons qu'Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) fut le premier homme à croire en la mission du Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui), et qu'il a été le Compagnon du Prophète du jour de son avènement jusqu'à sa mort !"
Sa grande connaissance de la sounna du Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) est attestée. L’imâm Souyoûtî a rapporté que lors des discussions dans la saqîfa au sujet de la succession du Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui), Aboû Bakr a dit aux ansâr (les Médinois d'origine) tout ce que le prophète de Allah avait dit à leur sujet, et qu'eux-mêmes ignoraient ! Ceci est une preuve supplémentaire de sa profonde connaissance des dires, actes et approbations du Prophète de Allah.
On explique le peu de hadîth transmis par Aboû Bakr, par le fait qu'il soit mort avant que les successeurs des Compagnons {at-tâbi 'oûn) ne prennent en charge la sounna du Prophète, et ne s'occupent de son assemblage.
Nous pouvons ajouter comme explication qu'il n'ait pas pu disposer de temps pour enseigner et transmettre la sounna aux musulmans, en devenant calife dès la mort du Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) : il s'est trouvé confronté à de nombreux problèmes afin de sauvegarder la communauté, particulièrement lors des guerres d'apostasie, il a dû envoyer des armées contre les empires de Perse et de Byzance, et en plus suivre les affaires des musulmans... Cela explique aisément que peu de hadîth nous soient parvenus par son intermédiaire.
Mais un nombre important d'illustres Compagnons ont transmis des hadîth rapportés par Aboû Bakr. Nous ne citerons que 'Omar, 'Othmân, 'Alî, Ibn 'Awf, Ibn Mass'oûd, Ibn Az-Zoubaïr, Ibn 'Amr, Ibn 'Omar, Ibn 'Abbâs, Houdaïfa, Anass, Zaïd Ibn Thâbit, Al B ara' Ibn 'Azib, 'Oqba Ibn Al Hârith, Zaïd Ibn Arqam, 'Imrân Ibn Houssaïn, Aboû Houraïra, Aboû Sa'îd Al Khoudri, Aboû Moussa al Ach'arî, Bilâl, 'Aïcha et Assmâ' ses deux filles, Jâbir Ibn 'Abd-Allâh et autres... (Que Allah soit satisfait d'eux tous).
Voici un choix de hadîth rapportés par Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) :
1 : Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) a rapporté que le Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) a dit au sujet de la mer : "Son eau est pure et purificatrice, et le cadavre en est licite !" (Rapporté par DARA-QOTNI). Ainsi, les animaux qui y vivent d'habitude et qui y sont recueillis morts sont licites et permis à la consommation).
2 : Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) a rapporté que le Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) a dit : "Le siwâk est un purificateur de la bouche, qui rend Allah satisfait de vous." (Rapporté par AHMAD)
3 : Aboû Bakr 4 : D'après Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui), le Prophète (Que Allah soit satisfait de lui) a raconté avoir demandé au Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) de lui apprendre une invocation qu'il utiliserait dans sa prière ; le Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) lui répondit : "Dis :
Seigneur j'ai commis beaucoup d'exactions envers moi-même, et en vérité, il n'y a que Toi Qui pardonnes les péchés ;
Seigneur accorde-moi par Ton pardon, et comble-moi de Ta Miséricorde, car Tu es Le Pardonneur, Le Très Miséricordieux par excellence !" (Rapporté par MOUSLIM)
(Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) a dit : "Celui qui aura fait la prière du matin en groupe, sera sous la protection de Allah (toute la journée). Celui qui porte atteinte à la vie de celui-ci porte, en vérité, atteinte à la Promesse de Allah ! Allah ne le lâchera pas jusqu'à ce qu'il le fasse traîner en Enfer, face au sol !" (Rapporté par IBN MAJJAH)
5 : Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) a rapporté que le Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) a dit : "Quiconque fait correctement ses ablutions, puis accomplit deux rak'ât et demande à Allah de lui pardonner, sera pardonné !" (Rapporté par AHMAD, et les quatre SOUNAN)
6 : Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) a raconté que le Prophète (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) a dit : "Evitez le Feu ne serait-ce que par une aumône que vous faites de la moitié d'une datte, car (une telle) aumône rectifie ce qui n'était pas droit (dans vos actes), vous protège de la mauvaise fin et a auprès de celui qui est dans le besoin le même effet (de le rassasier) que si c'était quelqu'un qui n'avait pas faim qui la mangeait !" (Rapporté par ABOU YA'LA)
7 : D'après Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) le Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) a dit : "Celui qui construit une mosquée pour Allah, Allah lui érige une maison au Paradis." (Rapporté par TABARANI)
8 : Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) a raconté avoir entendu le Prophète de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) dire : "Allah Le Très Haut a dit : "Si vous voulez avoir droit à Ma Miséricorde, alors soyez plein de compassion envers Mes créatures." (Rapporté par IBN HIBBAN et DAILAMI)
EXEMPLES DE JUGEMENTS PRONONCES PAR ABOU BAKR.
- Boukhari a rapporté que le calife Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) a donné droit au grand-père d'hériter à la place de son fils défunt.
De même, il a donné au petit-fils le droit d'hériter à la place de son père défunt.
De même il a donné le droit à l'héritage à la grand-mère paternelle et à la grand-mère maternelle, pour hériter à la place de leur fils ou fille défunt(e).
- Lors du divorce de 'Omar Ibn Al Khattâb et de sa femme, Aboû Bakr a donné le droit à la prise en charge de leur enfant Assim à la mère, disant à 'Omar : "Son odeur à elle, son affection et sa gentillesse sont meilleures et plus utiles pour lui que toi !" (Rapporté par Sa'îd Ibn Mansoûr d'après 'Omar)
- Al Baïhaqi a rapporté que Qaïss Ibn Abî Hâzim a raconté qu'un homme s'était présenté devant Aboû Bakr pour se plaindre de son père, qui voulait mettre la main sur tous ses biens et en disposer à sa guise ! Aboû Bakr ordonna au père de ne pas le faire, lui disant qu'il n'avait droit qu'à ce dont il avait besoin ! Alors le père lui dit : "Le Prophète de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) n'a-t-il pas dit : "Toi et ton argent, vous appartenez à votre père !" Aboû Bakr lui répondit:
"Certes, il l'a dit ! Mais il voulait parler du droit à une pension!"
- Ibn Abî Chaïba a rapporté qu'Aboû Bakr a décrété lors d'un jugement que la diyya (prix du sang) pour une oreille perdue par un acte de violence, est de quinze chameaux.
SERMONS D'ABOU BAKR
Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) a prononcé un jour un discours dont on a conservé le texte, que voici :
"Louange à Allah, Seigneur des mondes. Je Le loue, je Lui demande de l'aide, et je Lui demande l'honneur pour ce qui surviendra après la mort, car mon heure se rapproche ainsi que la vôtre. J'atteste qu'il n'y a pas de Allah sinon Allah l'Unique, Lui seul. Qui n'a aucun associé, et j'atteste que Mohammad est Son serviteur et Messager. Allah l'a envoyé avec la Vérité annonciateur de la bonne nouvelle, pour avertir celui qui est "vivant" (le musulman qui aura la vie éternelle), mais aussi pour affermir la vérité malgré les mécréants. Celui qui obéit à Allah et à Son Prophète est, certes, sur la bonne voie, tandis que celui qui leur désobéit, s'est égaré d'une manière évidente. Je vous recommande de craindre Allah, et de vous maintenir fermement à l'Ordre de Allah qu'il a légiféré pour vous, et vers lequel II vous a guidés ; car l'essence de l'Islam, après l'attestation (de foi), c'est l'obéissance à celui qui a été désigné à votre tête, et à qui Allah a délégué votre tutelle. Celui qui obéit à Allah et aux responsables de la communauté, et ce, en mettant en évidence le bien et en réprimandant le blâmable, aura, certes, le succès et se sera vraiment acquitté de son devoir. Je vous invite à être attentifs et à ne point suivre vos passions, car le gagnant sera celui qui se sera préservé de la passion, de la cupidité et de la colère. Prenez garde à la vantardise, car au nom de quoi pourrait-il se vanter, celui qui a été créé de terre, qui redeviendra de la terre et sera l'appât des vers de terre ! ? Celui qui est maintenant vivant, demain sera mort ! ?
"Œuvrez de jour en jour, et d'heure en heure, et prenez garde à l'invocation que pourrait faire contre vous celui que vous auriez opprimé, et considérez-vous parmi les morts ! Soyez patients, car l'action nécessite de l'endurance ; et dans ce cas le fait d'être attentif est très utile, et œuvrez car cela vous sera utile. Craignez le Châtiment de Allah, dont II vous a avertis, et empressez-vous de conquérir ce qu'il vous a promis de sa Bonté. Soyez perspicaces et comprenez convenablement, craignez-Allah et préservez-vous ; car votre Seigneur vous a explicité ce qui a causé la perte de ceux qui ont vécu avant vous, ainsi que ce qui les a sauvés. Allah vous a explicité dans Son Livre ce qu'il vous a interdit et ce qu'il vous a permis. Les actes qu'il aime vous voir faire, et ceux qu'il n'aime pas.
"(Sachez) que je vous servirai de toute mes forces, sans retenue, et Allah est, en vérité, Celui sur lequel on s'appuie. Car il n'y a de force, ni de puissance qu'en Allah.
"Sachez que ce que vous faites en toute sincérité, c'est envers votre Seigneur que vous le faites ; et vous préservez, par la même occasion, vos chances de réussite : c'est pour votre félicité que
vous œuvrez. Quant aux bonnes actions volontaires que vous accomplissez, faites en sorte que cela vous serve de provisions pour demain, pour compenser ce que vous avez négligé hier ! Elles vous seront rétribuées, le jour où vous serez comme un misérable, et que vous en aurez très certainement besoin !
"Serviteurs de Allah, rappelez-vous vos frères et amis qui sont partis, ils sont là, résidant auprès de ce qu'ils ont accompli auparavant. Ils sont descendus (après la mort) en des lieux de malheur ou de bonheur !
"En vérité. Allah n'a point d'associé, et II n'a pas entre Lui et Ses serviteurs de lien de parenté en vertu duquel II rétribuerait certains en bien, ou leur éviterait une punition. Tout cela ne s'aquiert qu'en Lui obéissant et en suivant Ses ordres ; et sachez qu'il n'y a pas de bien qui sera suivi du Feu, ni de mal qui sera suivi du Paradis.
"Je dis ceci, et je demande à Allah de me pardonner, ainsi qu'à vous. Priez sur votre Prophète ! Que la paix de Allah soit avec lui. Et que la paix de Allah, Sa Miséricorde ainsi que Sa baraka soient sur vous." (Rapporté par IBN 'ASSAKIR)
'Abd-Allâh Ibn Hakîm a rapporté qu'Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) a dit lors d'un sermon : "Je vous recommande de craindre Allah, et de Le louer par ce dont II a le mérite ; de mêler la crainte à l'amour de Lui ; car Allah a loué Zacharie et sa famille, en disant : "...Ils Nous invoquaient par amour et par crainte... " (S21/V90).
"Sachez, serviteurs de Allah, que Allah a pris pour otage votre âme : à vous, en contrepartie, de vous acquitter de vos devoirs vis-à-vis de Lui ! Car II a pris votre engagement à ce sujet ! Il vous a racheté le peu qui dépérit, contre quelque chose de plus important qui dure !
"Ceci est le Livre de Allah, dont la lumière ne diminue jamais et dont les miracles n'ont pas de fin ! Prenez conseil auprès de lui, et prenez des provisions de "sa lumière", pour le jour de l'obscurité" (dans la tombe). Car Allah ne vous a créés que pour L'adorer.
"Allah a chargé de votre surveillance des Anges nobles de vous surveiller qui enregistrent tous vos actes : ils savent ce que vous faites.
"Puis sachez, serviteurs de Allah, que vous voyez le matin, et le soir qui arrive, alors que vous êtes sous la coupe d'une décision (la mort) qui risque de vous faire tomber d'un moment à l'autre, et qui vous a été cachée. Donc, si vous pouvez faire en sorte que ce décret de Allah vous atteigne alors que vous êtes occupés à œuvrer pour Allah, faites-le ! Cependant, vous ne pourrez y parvenir qu'avec l'aide de Allah..."
PAROLES DE SAGESSE D'ABOU BAKR
Le calife Aboû Bakr as-Siddîq (Que Allah soit satisfait de lui) a dit :
- "Que Allah bénisse un individu qui s'est mis tout entier au service de son frère !"
- "Il n'y a aucun bien dans une aisance qui aurait comme suite l'Enfer ! Et il n'y a aucun mal dans un mal (difficulté, souffrance) qui aura comme suite le Paradis !"
- "Si quelque bien t'échappe, cherche à le rattraper, et si le bien te rejoint, alors cherche à le surpasser !"
- "Sache qu'auprès de toi, il y a des surveillants qui t'observent de la part de Allah !"
- "Cherche à te corriger : les gens seront amenés à être corrects avec toi.
"Allah voit ton intérieur, de la même manière qu'il perçoit ce qui est apparent en toi !"
"La sagesse la meilleure est de craindre Allah. La bêtise la plus grave est de Lui désobéir ; la vérité la plus authentique est de préserver le dépôt confié al amânat), et le plus grave mensonge, c'est la traîtrise !"
- On a rapporté que le poète Labîd s'est présenté devant Aboû Bakr et a chanté ces vers :
"En vérité, toute chose en dehors de Allah n'est que mensonge!
Alors Aboû Bakr lui dit : "Tu dis vrai !" Puis Labîd continua et dit :
"Et tout délice est amené à disparaître !"
Alors Aboû Bakr lui répondit : "Tu mens ! Auprès de Allah il y a un délice qui ne dépérit jamais !" Puis, après le départ de Labîd, il dit : "Parfois le poète prononce des paroles de sagesse!"
- On a rapporté qu'Aboû Bakr passa près de 'Abd-Arrahmâne Ibn 'Awf qui se disputait avec son voisin ; alors il lui dit : "Ne te querelle pas avec ton voisin, car lui, il reste, alors que les autres ne seront pas là (pour t'aider) !"
- On a rapporté que lorsqu'Aboû Bakr présentait ses condoléances à quelqu'un, il disait : " En vérité, il n'y a pas de réconfort que l'on puisse apporter pour un malheur ; cependant ne pas patienter cela n'apportera rien ! La mort est plus aisée que ce qui l'a précédée, et n'est pas plus dure que ce qui va lui succéder ! Rappelez-vous la disparition du Messager de Allah ; votre malheur s'amenuisera. Et que Allah vous récompense amplement pour votre endurance devant ce malheur (qui vous affecte). (Rapporté par IBN 'ASSAKIR d'après Aboû 'Ouyaïna)
PAROLES ET COMPORTEMENTS PIEUX D'ABOU BAKR
Aboû Bakr était réputé par sa piété et il veillait à ne consommer que les choses d'origine licites. Ka'b Ibn 'Ajra a raconté qu'Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) avait un jeune esclave avec lequel il avait conclu un contrat de rachat de liberté. Ce dernier, chaque jour, lui apportait une partie de son dû en nourriture, et à chaque fois Aboû Bakr le questionnait sur son origine ; si elle était licite, il l'acceptait, sinon il la refusait. Un jour qu'Aboû Bakr jeûnait, le jeune homme lui appporta de la nourriture. Aboû Bakr en mangea au moment de rompre son jeûne sans poser la question habituelle ; soudain, il se le rappela et demanda au jeune homme d'où il avait gagné cette nourriture. Le jeune homme lui répondit : "C'est l'arriéré d'un paiement pour une fausse divination que j'ai faite pour des gens, avant que je ne devienne musulman !" Aboû Bakr bondit de sa place et dit:
"Oh ! Tu as failli me mener à la catastrophe !", puis il se mit le doigt dans la bouche pour se faire vomir, mais voyant qu'il ne pouvait pas y arriver, il demanda de l'eau et se mit à boire puis à se faire vomir, jusqu'à ce qu'il se soit assuré qu'il ne restait rien dans son estomac de la nourriture qu'il avait avalée. Certains lui dirent : "Que Allah te bénisse, ô Aboû Bakr ! Tout ça pour une seule bouchée !" Il leur répondit : "S'il avait fallu pour la faire sortir faire sortir mon âme avec, je l'aurais fait, car j'ai entendu le Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) dire : "Tout corps qui a vu sa croissance évoluer grâce à une nourriture interdite, a fortiori, le feu en est plus méritant !", alors j'ai craint que mon corps ne soit nourri par cette bouchée interdite." (Rapporté par BOUKHARI)
Mou'âdh Ibn Jabal (Que Allah soit satisfait de lui) a rapporté qu'un jour, Aboû Bakr était entré dans un verger, et voyant un oiseau perché sur une branche, il lui dit : "Bienheureux que tu es ! Tu te nourris de cet arbre et tu te protèges avec son ombre! Puis lorsque tu mourras, tu ne seras point jugé ! Oh ! si Aboû Bakr pouvait être comme toi !" (Rapporté par AHMAD et AL HAKIM)
On demanda à Aboû Bakr ce que signifiait tel verset, alors il répondit : "Quelle terre pourrait me contenir, et quel ciel pourrait me couvrir, si je disais au sujet de la Parole de Allah ce que Allah n'a pas voulu dire !"
On a rapporté qu'Aboû Bakr avait l'habitude de jeûner pendant les jours d'été, et qu'il s'abstenait de jeûner en hiver !" (Rapporté par AHMAD)
'Omar Ibn Al Khattâb (Que Allah soit satisfait de lui) a rapporté qu'un jour, il avait vu Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) se tenir la langue et dire : "C'est celle-là qui m'a entraîné sur le chemin de la perdition !" (rapporté par NASSA'I)
QUELQUES INVOCATIONS D'ABOU BAKR
Mou'âwiya Ibn Qourra a rapporté que lorsqu'Aboû Bakr invoquait Allah, il disait : "Seigneur, fais en sorte que la fin de ma vie soit la meilleure, et que la meilleure de mon action soit la dernière, et que le meilleur jour pour moi, soit le jour de Ta rencontre !" (Rapporté par Sa'îd Ibn Mansoûr)
Al Hassan (Al Basrî) a raconté qu'on lui a rapporté que lorsqu'Aboû Bakr invoquait Allah, il disait : "Seigneur je Te demande ce qui est le meilleur pour moi dans mon devenir. Seigneur, fais en sorte que le tout dernier bien que Tu me donneras soit Ta satisfaction, et les hauts degrés dans les Jardins des délices (éternels)." (Rapporté par AHMAD)
Lorsqu'Aboû Bakr priait sur un mort, il disait : "Seigneur, Ton serviteur, sa famille, ses biens et son clan l'ont délaissé ! (Seigneur) ! Le péché est énorme, et Tu es, certes, Pardonneur, Miséricordieux, vraiment !" (rapporté par IBN ABI MALIK)
On a rapporté que lorsque quelqu'un vantait Aboû Bakr, ce dernier disait : "Seigneur ! Tu es mieux informé que moi-même à mon sujet, et moi je suis mieux informé qu'eux de ce que je suis ! Seigneur, fais en sorte que je sois mieux que ce qu'ils pensent, pardonne-moi ce qu'ils ignorent de moi (les défauts), et ne me tiens pas rigueur de ce qu'ils disent de moi !" (Rapporté par IBN 'ASSAKIR)
Aboû 'Imrân Al Jouni a raconté qu'Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) disait : "Je souhaiterais tant être un poil sur le corps d'un serviteur croyant !" (Rapporté par AHMAD IBN HANBAL)
MORT D’ABOU BAKR
Tabarî a rapporté dans son Tarîkh qu'Aboû Bakr avait été invité à un repas par un des principaux chef de la communauté juive de Khaïbar ; le calife se trouvait à table avec Al Hârith Ibn Khalada, qui était le médecin réputé des Arabes, et on leur présenta un plat de riz. Aboû Bakr en mangea une bouchée. Al Hârith en prit de même une bouchée, mais la rejeta aussitôt en s'écriant : il y a dans ce riz un poison qui tue au bout d'une année ! Et il en fut ainsi : au bout de cette même année, Aboû Bakr tomba malade un lundi, et mourut quinze jours après, le mardi, huit jours avant la fin du mois."
Alors qu'Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) agonisait, il se découvrit le visage et dit à sa fille 'Aïcha (Que Allah soit satisfait d'elle), qui était affligée : "Ne sois pas dans cet état, mais récite plutôt : "Et puis, voici le vertige de la mort, dévoilant du coup la vérité. Voilà, Homme, ce que tu cherchais à fuir!" (S50/V19). Aboû Bakr dit ensuite : "Prenez ces deux habits, lavez-les, et utilisez-les pour mon linceul ; car les vivants ont plus besoin du neuf que le mort !"
Lorsqu'Aboû Bakr sentit la mort venir, les gens lui demandèrent de leur recommander un successeur, alors il leur désigna 'Omar Ibn Al Khattâb. On lui dit qu'il désignait à sa succession quelqu'un de dur, dont le cœur n'était pas tendre ! Et on lui demanda ce qu'il dirait demain à son Seigneur. Aboû Bakr répondit : "Je dirai : "J'ai désigné à la tête de Tes créatures, le meilleur d'entre eux !"
Dans une autre version on a rapporté qu'Aboû Bakr avait formulé l'intention de désigner 'Omar à sa succession, mais qu'il voulait s'assurer du bien-fondé de sa démarche, et qu'il s'adressa alors à 'Abd-Arrahmâne Ibn 'Awf, en lui demandant de lui dire ce qu'il savait de 'Omar. Celui-ci lui répondit : "Tu m'interroges au sujet de quelque chose dont tu es plus informé !" Mais Aboû Bakr insista, alors il dit : "II est le meilleur homme sur lequel on puisse avoir un avis quelconque, cependant il est dur !" Aboû Bakr lui dit : "En vérité s'il se comporte ainsi, c'est parce qu'il constate que je suis doux avec les gens ; mais si la charge de l'Etat lui revient, il délaissera beaucoup de l'apparence qu'il essaie de se donner !" Puis Aboû Bakr s'adressa à 'Othmân, et lui demanda la même chose. 'Othmân lui dit : "Par Allah ! Tout ce que je sais de lui, c'est que son fond est meilleur que ce qu'il apparaît de lui de l'extérieur, et qu'il n'y a pas parmi nous quelqu'un de meilleur que lui !" Puis Aboû Bakr demanda à 'Othmân de garder secrète la discussion qu'ils avaient eue ensemble.
Puis Aboû Bakr demanda la même chose à Oussaïd Ibn Houdaïr, à Sa'îd Ibn Zaïd ainsi qu'à d'autres Compagnons, mouhâjiroûn et ansâr, et tous ont conforté Aboû Bakr dans son avis. Alors Aboû Bakr convoqua 'Othmân Ibn 'Affan et lui dicta ce qui suit :
"Ceci est ce qu'Aboû Bakr Ibn Abî Qouhâfa confie à 'Omar! Au Nom de Allah Le Très Clément par essence. Le Très Miséricordieux par excellence ! Ensuite...", puis il s'évanouit...
Alors 'Othmân écrivit : "J'ai désigné à ma succession 'Omar Ibn Al Khattâb, et j'ai fait tout mon possible pour ne chercher que le bien pour vous."
Après qu'il eut repris conscience, il demanda à 'Othmân de lui lire ce qu'il avait rédigé, et quand il lui lut le texte, Aboû Bakr dit : "Allâhou Akbar ! Je vois que tu as craint que les gens ne divergent si j'étais mort pendant mon évanouissement (et tu as parachevé le texte de mes dernières volontés) !" 'Othmân répondit par l'affirmative. Alors Aboû Bakr lui dit : "Que Allah te récompense pour le bien que tu as conçu pour l'Islam et les musulmans ; ensuite Aboû Bakr confirma ce qu'il avait rédigé.
Tabarî a rapporté qu'ensuite Aboû Bakr apparut aux musulmans, s'appuyant sur sa femme Assmâ' Bint 'Oumaïss, s'adressa à eux et leur demanda s'ils acceptaient celui qu'il leur avait choisi comme successeur, leur expliquant qu'il avait fait son possible pour être de bon conseil aux musulmans par ce choix qu'il avait fait. Il les as informé qu'il avait choisi pour sa succession 'Omar Ibn Al Khattâb, qui n'était pas un parent à lui, et qu'ils lui devraient obéissance après sa mort, alors les gens répondirent : "Nous avons entendu, et nous obéirons !"
Ensuite Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) convoqua 'Omar, avec lequel il s'isola en privé et lui dit :
"Je t'ai désigné à ma succession, et je te recommande de craindre Allah. Allah exige que l'on s'acquitte de certains devoirs de nuit, qu'il ne peut accepter que l'on retarde pour les accomplir de jour ! De même, il y a des charges que l'on doit accomplir de jour, Allah n'aime pas qu'on les retarde pour les exécuter de nuit ! Allah n'accepte pas d'actes surérogatoires tant que l'on ne s'est pas acquitté de l'obligatoire, qui est prioritaire ! Et si certains verront, au Jour dernier, leur balance pencher vers le bien, ce ne sera, certes, que grâce à leur attachement à la Vérité.
"Tandis que ceux dont les pesées seront légères, ce sera parce qu'ils auront suivi les voies de l'égarement ; et il est bien évident qu'une balance qui n'aura été chargée que de mauvais actes, ne vaudra pas grand-chose !
"Allah a cité les gens du Paradis en les louant par les meilleurs actes qu'ils ont accompli, et II leur a pardonné leurs erreurs. Si tu les cite, à ton tour, dis-toi : "J'ai peur de ne pas être parmi eux !" De même Allah a parlé des gens de l'Enfer, et II leur a rappelé ce qu'ils commettaient. Lorsque tu te souviens d'eux, demande à ne pas être de ceux-là. Ne te rappelle pas uniquement des versets où il n'est question que de la Miséricorde de Allah, mais souviens-toi en même temps des versets qui parlent de Son Châtiment pour que tu sois de ceux qui craignent Allah et espèrent en Lui. Pour que tu sois quelqu'un qui ne demande de Allah que ce qui est conforme à la Vérité, et ne se jette point dans les chemins de la perdition ! Si tu prends en considération mes recommandations, fais alors en sorte que le meilleur absent que tu souhaites rencontrer soit la mort, car elle va te rejoindre; mais si tu négliges ce que je t'ai recommandé, la mort sera cet absent que tu n'aimes pas rencontrer, alors, qu'en vérité, tu ne pourras point la fuir !"
Lorsque 'Omar (Que Allah soit satisfait de lui) le quitta, Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) leva ses mains au ciel, et invoqua Allah en disant :
"Seigneur, je n'ai voulu par cette décision que le bien des musulmans, pour les préserver de tout désordre (fitna) c'est pourquoi j'ai agi selon ce que Tu sais mieux que quiconque, et j'ai fait de mon mieux pour faire le bon choix ; j'ai donc désigné à leur tête le meilleur d'entre eux, le plus capable parmi eux pour s'acquitter de cette charge, celui qui est le plus attentif et le plus sage. Voilà que Ta décision en moi s'accomplit (par la mort) : sois Celui Qui les prendra en charge, car ils sont Tes serviteurs ; leur volonté est entre Tes Mains. Seigneur, réforme en bien leur tuteur, fais en sorte qu'il soit parmi tes "califes bien-guides", et réforme pour lui ses sujets."
* * *
Le califat d'Aboû Bakr as-Siddîq dura exactement deux ans, trois mois et huit jours.
Sa maladie, qui survint le lundi sept du mois de Joumâdâ, en l'an treize de l'Hégire, dura quinze jours, et il mourut le mardi, à l'heure de la prière du soir, huit jours avant la fin du mois. Aboû Bakr (Que Allah soit satisfait de lui) mourut à l'âge de soixante-trois ans. Sa femme Assmâ' Bint 'Oumaïss et son fils 'Abd-Arrahmâne se chargèrent du lavage rituel de son corps. Selon Tabarî, 'Omar Ibn Al Khattâb (Que Allah soit satisfait de lui) ordonna qu'on l'enterrât immédiatement. Il fut enterré à côté de la tombe du Prophète de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui) dans la chambre personnelle {chouqqa} du Messager de Allah (Que la Bénédiction et le Salut de Allah soient sur lui). 'Omar, Talha et 'Abd-Arrahmâne (le fils d'Aboû Bakr) descendirent dans la tombe et y placèrent le corps.
Que Allah comble de Sa Miséricorde le calife du Prophète de Allah, pour sa sincérité vis-à-vis de la communauté ! Que Allah le récompense en bien pour son bon conseil, et pour sa générosité, car c'est grâce à son jugement juste au sujet de 'Omar Ibn Al Khattâb, que la communauté vivra des jours inoubliables de justice sous l'égide de 'Omar Ibn Al Khattâb al fâroûq.
Que Allah soit satisfait des califes du Messager de Allah !